Réussir ses dialogues : équilibrer son roman entre récit et dialogues

by Marièke

Bonjour à toutes et à tous,

Il y a maintenant presque 5 ans, je vous donnais mes astuces pour réussir ses dialogues : Comment rendre ses dialogues naturels ? Ces astuces vous expliquaient comment faire un dialogue réussi mais pas forcément comment intégrer votre dialogue dans l’histoire de façon réussie 🙂 C’est pourquoi j’avais envie de revenir sur ce sujet aujourd’hui.

Alors comment réussir ses dialogues ? On en parle !


Avant de commencer

Comme indiqué en introduction, dans mon article Comment rendre ses dialogues naturels ?, je vous proposais 5 astuces pour réussir vos dialogues dans leur forme.

En vrac :

  • Donner une voix à vos personnages
  • Éviter les verbes de parole à outrance
  • Ajouter des actions
  • Éviter les longs monologues
  • Éviter de tout dire

Ces astuces, je les utilise aujourd’hui quand je compose mes dialogues et je vous invite à relire cet article si certains points ne vous semblent pas clairs.

Cependant, ces pistes ne traitent pas de l’équilibre du dialogue dans la construction du récit et dans l’avancement d’une œuvre. Il me semblait essentiel d’aller plus loin sur ces sujets car cela va de l’équilibre d’un texte.

Réussir ses dialogues : tout est dans l’équilibre !

Au-delà de la crédibilité d’un dialogue – pourrait-il avoir lieu en vrai ? Est-il téléphoné ? Est-il trop grandiloquent ? – qui menace un récit, il y a le déséquilibre des dialogues. Lorsqu’un texte comporte trop ou pas assez de dialogue, cela peut le rendre fragile.

S’il y a trop de dialogues :

  • problème d’épaisseur et de profondeur des personnages : un personnage n’est pas qu’une bouche !
  • manque d’action : quand les personnages parlent d’une action plutôt que la faire, c’est souvent mauvais signe (flemmardise de l’auteur·trice, mauvais choix de point de vue…)

À l’opposé, s’il n’y a pas assez de dialogue :

  • manque un aspect de découverte des personnages : la façon de parler des personnages nous apprennent beaucoup !

Bien entendu, vous pouvez avoir des personnages bavard ou au contraire plutôt taiseux : dans ce cas l’afflux ou le manque de dialogue fait partie de leur personnage et les constitue.

Bien entendu aussi, vous pouvez avoir un style littéraire qui vous pousse à composer des dialogues ou à l’inverse, à en proposer très peu. Mettre beaucoup ou peu de dialogues est en effet aussi un choix de style.

Le cas des scripts (films et théâtre)

Mon article traite en premier lieu de l’écriture d’un roman.

Les films et les pièces de théâtre ont un rapport différent au dialogue qui est l’un de leurs outils principaux pour faire avancer l’intrigue (surtout pour le théâtre).

Certaines intrigues de film vont nécessiter d’avoir des explications et donc potentiellement des monologues.

De même, certaines pièces de théâtre vont impliquer de raconter des événements ayant lieu en dehors de la scène. Les grandes tragédies grecques, par exemple, racontent sous la forme de dialogues de grandes batailles ou de grands drames – quelque chose qu’il sera difficile de reproduire dans un roman par exemple (votre lectorat verra certainement d’un mauvais oeil qu’une grande bataille ayant une forte influence sur vos personnages et votre histoire se déroule hors champ).

Équilibrer son récit : 6 astuces !

À présent qu’on s’est arrêté sur le pourquoi de l’équilibre du récit, voyons comment le faire 🙂 Voici des pistes pour atteindre cet équilibre entre récit et dialogues.

#1 Éviter les dialogues qui n’amènent à rien

De même qu’une scène vide de sens et d’objectifs ne devrait pas exister dans votre roman, un dialogue posé là pour être là n’a pas d’intérêt. Un dialogue devrait toujours avoir un objectif. De façon générale, il vaut mieux éviter les dialogues inutiles.

Il y a, en gros, deux objectifs pour un dialogue :

  1. Faire avancer l’intrigue : amener à une découverte, révéler quelque chose, découvrir un indice…
  2. Révéler un personnage : montrer le caractère d’un personnage ou l’état d’une relation, faire évoluer une relation entre deux personnages…

Oui, ce n’est pas parce qu’il n’y a que deux objectifs que vous n’avez pas d’occasion pour coller un dialogue 🙂 En effet, ces derniers sont assez larges pour vous donner pas mal de marge !

#2 Éviter les dialogues qui amènent à tout

À l’opposé, les dialogues qui amènent à tout peuvent être frustrants pour le lectorat. Prenez un roman policier : si chaque prévenu avoue ses fautes ou donne une vérité qui fait avancer l’enquête, il est très possible que l’on se fasse vite ch***.

Bien entendu, le dialogue entre deux personnages peut être un levier pour faire avancer votre intrigue mais ça ne peut pas être le seul levier. Sinon, vous risquez d’avancer dans un roman au schéma basique : problème > dialogue > solution. Et ainsi de suite.

Pour faire avancer votre intrigue, vous avez d’autres solutions :

  • les actions : une tentative de meurtre, une bagarre, un hasard, un nouveau fait qui s’ajoute…
  • les prises de décision : elles peuvent résulter d’un dialogue, d’un monologue entre le personnage principal et lui-même, d’un coup de tête…

#3 Éviter la redite : les dialogues qui se répètent

Si vous venez de faire une scène sur Anna et Clémence qui prennent rendez-vous le lendemain, il n’est pas forcément nécessaire que Anna passe quatre lignes de dialogues à avertir sa mère qu’elle sort et qu’elle a rendez-vous.

De façon générale, la redite est vite lourde et il n’est pas souhaitable que deux dialogues qui se suivent traitent du même sujet.

Sauf si :

  • vous souhaitez montrer comment Anna et sa mère s’entendent mal
  • vous avez en tête de montrer que Anna ment à sa mère : elle n’a pas rendez-vous avec Clémence mais avec Clément, son petit ami.

Comme d’habitude, il n’y a pas de vérité vraie et de vérité unique en écriture. Dans certains cas, il vous semblera essentiel qu’il y ait redite, pour montrer quelque chose ou faire ressortir quelque chose : dans ce cas, lancez-vous !

Une astuce : le discours indirect

Si vous faites une redite de dialogue non parce que vous le ressentez comme ça mais parce que vous ne savez pas trop comment faire autrement, sachez qu’il existe le discours indirect.

Le discours indirect consiste pour le/la narrateur·trice à retranscrire, dans ses propres mots, un dialogue entre deux ou plusieurs personnages.

La phrase de dialogue « Maman, demain je retrouve Clémence à 10h pour un petit déj' » peut devenir « Juste avant d’aller se coucher, Anna avertit sa mère qu’elle retrouverait Clémence le lendemain à 10h pour un petit déj’. »

#4 Apprendre à couper les dialogues

Autre truc qui alourdit les dialogues : un début et/ou une fin trop long à se dessiner.

« Coucou, ça va ?
– Oui et toi ?
– Oui, merci ! »

Sauf nécessité (montrer une salutation spécifique en début de roman par exemple), ce début peut être coupé. Il n’apporte rien à l’intrigue et est redondant avec quelque chose que le lectorat sait déjà : lorsqu’il rencontre ses amis, le personnage les salue.

Une bonne solution est ici de mettre une ligne en discours indirect « Je retrouvais mes amis en début d’après midi et les saluais. J’étais tellement excitée à l’idée de leur parler que je ne tardais pas à leur annoncer la bonne nouvelle » et paf, discours direct.

En d’autres termes, il est souvent inutile de s’appesantir sur des détails qui n’apportent rien et ralentissent le récit.

#5 Éviter les grandes phrases

On parlait un peu plus tôt des monologues et des dialogues mal calibrés qui faisaient avancer à eux seuls l’intrigue… Les grandes phrases font partie de ces défauts de calibrage.

Les grandes phrases, ce sont ces phrases pleines d’emphases que balancent les personnages. Genre « Un grand pouvoir amène de grandes responsabilités. » (Vous avez la réf ?).

C’est bien d’en avoir quelques unes dans un roman, mais ça peut vite être un peu lourd si à chaque fois que vos personnages ouvrent la bouche, ils s’interrogent sur le sens de la vie et de la mort, la place de l’humain dans l’univers et j’en passe.

Dis autrement, c’est bien d’avoir des dialogues marquants et des phrases qui donnent envie d’être surlignées mais ça peut aussi très vite sortir votre lectorat de votre histoire. Essayez de doser. Il arrive que nos échanges soient aussi philosophiques que « Tu as acheté du pain ? » 🙂

Disclaimer : Comme d’habitude, il n’est pas impossible que l’un de vos personnages ne s’expriment que par petites phrases. Prenez Galadrielle ou Yoda : ces deux personnages sont des citations ambulantes.

#6 Jouer des mésententes

Au moment de composer un dialogue, il est essentiel de ne pas oublier que, dans la vie, il y a une différence entre : Ce que l’on pense > Ce que l’on dit > Ce qui est entendu > Ce qui est interprété

Ce que l’on pense > Ce que l’on dit : Pas toujours facile de dire ce que l’on pense. Votre personnage peut avoir peur de blesser son vis à vis, il peut avoir peur de ses sentiments, il peut un jour exploser et ne pas dire exactement quel problème il rencontre, etc.

Ce que l’on dit > Ce qui est entendu : Si un de vos personnages est sourd ou qu’il est en train de faire des travaux au fond du jardin, il peut y avoir des différences entre ce qui est dit et ce qu’il entend.

Ce qui est entendu > Ce qui est interprété : Selon sa culture, son chemin de vie, son niveau d’énervement et j’en passe, il peut y avoir une marge d’interprétation plus ou moins forte entre ce qui est entendu et ce qui est interprété / compris.

Bref : imaginez la distance entre Ce qui est pensé par le personnage A et ce qui est interprété par le personnage B. Le potentiel des dialogues et des mésententes autour des dialogues est infini 🙂 Pensez à en profiter car cela peut apporter de la profondeur à vos récits !


Je termine sur mes astuces pour réussir ses dialogues. J’essayerai de vous composer vite une vidéo qui réunira l’ensemble de mes astuces pour vous permettre de toutes les avoir au même endroit.

Quelles sont vos propres astuces ? En avez-vous d’autres ? Comment révisez-vous vos dialogues ?

Belle journée,

Marièke

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1 comment

Lorenzo Villard 28 avril 2022 - 17 h 14 min

« le schéma : problème > dialogue > solution » : je ne sais pas pourquoi, ça m’a fait rire 🤣

Sinon j’ai bien aimé l’article. Je n’avais pas vraiment réfléchi à la place que prenaient les dialogues dans mes romans. Je garde l’article sous le coude pour mes futures relectures !

Ah aussi, tu m’as fait penser à explorer ce qu’il se passe que le message reçu n’est pas celui envoyé. Les quiproquos peuvent être intéressants − et pas seulement comiques. Le quiproquo classique de la phrase ambiguë n’est pas le plus intéressant je trouve ; quand le lecteur sait que deux personnages ont des informations différentes et que les deux l’interprètent différemment ; ou bien quand l’un comprend un sous-entendu et pas l’autre…
D’ailleurs, ça me fait penser qu’on peut parfois montrer que les personnages n’ont pas compris la même chose avec un unique point de vue interne ; via les actions et paroles…

C’est peut-être un peu confus, j’ai juste suivi mes pensées là 😅

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