Bonjour !
J’ai reçu ces dernières semaines plusieurs questions à propos de la notion de conflit dans un roman. Je l’ai notamment utilisée dans l’article sur Créer le plan d’un roman en dix étapes, article que vous êtes nombreuses et nombreux à lire chaque jour. Après avoir tenté d’expliquer, par mail et à plusieurs reprises le concept de conflit tel que je l’utilise pour créer l’intrigue de mes textes, je me suis décidée à lui dédier un article afin de vous éclairer sur le sujet.
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Développer l’intrigue d’un roman
L’intrigue d’un roman se développe une phrase après l’autre, un paragraphe après l’autre, une scène après l’autre, un chapitre après l’autre. Jusque là, la logique est respectée. Mais comment construire ces différentes entités ?
#1 De façon chronologique
La première solution pour construire une intrigue et imbriquer ses paragraphes les uns après les autres est de fonctionner de façon chronologique.
Trois exemples de ce type de construction :
- le journal intime qui se déroule jour après jour
- le conte de fée, où la suite chronologique des événements est très formulée de façon évidente
- un roman comme Harry Potter — où chaque livre représente une année
#2 De façon thématique
La deuxième solution pour écrire une intrigue peut-être de la faire par thématiques. Chaque chapitre est lié à une thématique en particulier et souvent, le titre du chapitre se rapporte au thème choisi.
#3 Un personnage après l’autre
La troisième construction de récit est parfois faite autour des personnages. Chaque chapitre est conté par l’intermédiaire du point de vue d’un personnage différent, à la première personne ou à la troisième, en point de vue interne. C’est une construction que l’on retrouve très souvent.
Deux exemples :
- Games of Throne : Chaque chapitre suit un personnage et raconte les intrigues liées à ce personnage
- Le secret d’Orbae, de François Place : Ce livre est conté en deux parties de taille égale. La première partie est consacrée à suivre le personnage masculin, la seconde suit le personnage féminin.
#4 Grâce au conflit
La dernière solution dont j’ai envie de vous parler aujourd’hui pour faire avancer le récit est parfois mixée avec les précédentes. Il s’agit de ce que j’appelle le conflit, mais on retrouve aussi les appellations « tension narrative » et « enjeu ». Chaque chapitre porte un conflit interne qui fait avancer le chapitre et l’intrigue générale.
Prenez Plus belle la vie, mon exemple préféré en matière de construction d’intrigue. Le pitch est toujours composé de trois phrases : 1) l’intrigue principale (l’arc des trois mois), 2) l’intrigue secondaire (l’arc de la semaine) et 3) l’intrigue tertiaire (l’arc du jour). Chacune de ces intrigues est portée par un conflit.
Cette notion se retrouve aussi dans les séries. Dans la construction de la majorité des séries, on retrouve un système très similaire : une intrigue principale qui porte la série toute entière, une intrigue secondaire qui porte la saison et une intrigue tertiaire qui trouve son début, son milieu et sa fin dans l’épisode.
La notion de conflit
Je parle régulièrement de la notion de conflit sur ce blog. En effet, je pense que le conflit est un ingrédient indispensable dans la construction d’un roman. Plus encore, il est indispensable dans chaque scène qui compose un roman puisqu’il va être le moteur de votre intrigue.
Le conflit n’est pas forcément :
- Une guerre
- Une dispute ouverte
- Une bagarre
- Une agression…
En d’autres termes, le conflit compris comme outil pour faire avancer l’intrigue de votre roman n’est pas forcément violent. C’est un enjeu qui se déroule durant le texte et qui justifie le fait que l’on parle de cette scène.
Le conflit n’est pas non plus une péripétie. Une péripétie est un événement particulièrement important, une révélation, un conflit, un indice qui amène l’intrigue à changer d’orientation — tandis que le conflit permet simplement de faire avancer l’intrigue peu à peu.
Exemples de conflits dans un roman
Parce que la notion de conflit est parfois assez floue, voici quelques exemples puisés dans mon NaNoWriMo actuel 🙂
Pour mon premier chapitre, j’avais envie de donner un peu de visibilité à l’un de mes personnages principaux, Khali. Dans ce cadre, je souhaitais la décrire dans quelques scènes, dans le but de la développer. Cependant, inutile de vous dire qu’un roman qui commencerait par une longue description physique et morale d’un personnage serait immensément ch****. C’est pourquoi j’ai décidé de construire ces premières scènes autour de plus éléments qui donnent un enjeu / un conflit à cette scène — au-delà de « présenter le personnage principal ». Ainsi, ma première scène montre Khali en train de se faire harceler par son petit chef qui la traite ainsi parce qu’elle est une esclave, une femme et une ancienne fugueuse.
Notez que cette technique revient au fameux adage : Show, don’t tell. Il est bien plus efficace, narrativement parlant, de présenter une scène de dialogue qui montre deux personnages en train de se prendre le chou que de dire « Khali et Michail ne s’entendaient pas » ou « Khali avait un fort caractère ». Le fait qu’elle se prenne la tête avec son supérieur est très parlant et cela ajoute du conflit 🙂
Il est possible de créer du conflit sur tout, tout le temps. Un dialogue peut avoir un enjeu, une bagarre peut avoir un enjeu, mais une réflexion peut aussi avoir un enjeu. Quelques scènes plus tard, un autre de mes personnages principaux doute de sa décision : c’est aussi une forme de conflit, c’est un conflit intérieur.
Ma façon de concevoir le conflit dans mes textes
Personnellement, c’est grâce à la notion de conflit que je monte tous mes romans : je les construis scène par scène et je ne conçois pas une scène sans enjeu. Dans ma conception, si une scène n’a pas de conflit, elle ne mérite pas d’être présente dans mon texte car elle ne fait pas avancer l’histoire.
Dans ce cas, il peut m’arriver soit de :
- la supprimer,
- la remplacer par quelques lignes de transitions — pour emmener l’intrigue plus rapidement vers un nouvel enjeu
- créer un enjeu car j’ai l’impression que la scène est importante pour montrer l’évolution du personnage / d’un lieu. Ajouter un enjeu va la mettre en exergue et la rendre plus importante.
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J’espère que cet article aura su vous éclairer sur la notion d’enjeu / de conflit dans la scène d’un roman. Je suis en train de réfléchir à une série de fiches imprimables et j’envisageais d’en faire pour planifier un texte : cela vous intéresserait ? (Dites-le moi dans les commentaires, ce sera pour 2019 !)
A très vite,
Marièke
6 comments
Merci pour cet article qui m’aise À y voir un peu plus clair.
Et je suis partante pour les fiches.
Bonne journée
Maud
Comme toujours, un article lumineux ! C’est exactement ce que j’ai détecté dans mon nano en cours, mon intrigue manquait de conflit et j’ai pris le temps de me poser sans écrire pour reprendre tout à zéro et trouver ce qui fait marcher mes personnages.
Sinon, oui pour les fiches, c’est une belle idée !
Un très bon article, très utile (encore une fois !). Et pour les fiches, c’est un grand OUI !!
Article intéressant que je garde sous le coude car ça peut toujours me resservir (mémoire de poisson rouge xD). C’est bien expliqué en tout car c’était un peu confus pour moi avant. Merci ! Les fiches seraient un vrai plus car on pourrait les imprimer et les garder en tant que pense-bête/rappel 🙂
Je note pour les fiches, merci pour ton retour ! 🙂
Ta façon de concevoir le conflit dans tes scènes me fait un peu penser au livre « How to write a Dynamite Scene ». Tu l’as lu ?