Tout sur l’enchainement des scènes dans un roman

by Marièke

Bonjour à toutes et à tous, 

Après plusieurs articles, et notamment mes articles sur l’usage des paragraphes et sur le suspense, vous avez été nombreuses et nombreux à me demander un article sur l’enchainement des scènes dans un roman – comment arrêter une scène, comment commencer une scène, comment la découper ?

J’ai pensé qu’il pourrait être très intéressant de vous faire un article sur le sujet tant cela me semblait vaste. Le voici donc aujourd’hui. 

Belle lecture !


Une scène, c’est quoi ? 

Une scène est l’une des entités du roman. Le roman comporte (du plus petit au plus grand élément) :

  • La phrase
  • Le paragraphe
  • Les scènes
  • Les chapitres
  • Les parties

Une scène est ainsi composée de paragraphes et fait souvent partie d’un chapitre. Tous les romans ne comportent pas forcément de scène. La notion de scène est ainsi reprise du cinéma et du théâtre – où les scénarios se découpent en actes et en scènes.

Chez la majorité des auteurs et des autrices, la scène est une entité de :

  • Lieu : toute la scène se passe au même endroit et le fait de quitter le lieu clôt la scène ;
  • Thème / sujet : toute la scène tourne autour d’un sujet. Le fait d’en finir sur ce sujet permet de clore la scène ;
  • Durée : toute la scène se passe en une journée, une semaine, un mois… ;
  • Personnage : une scène peut être centrée sur un personnage. Quand celui-ci sort du champ, la scène se termine.

Tous les livres sont différents en ce qui concerne le traitement de leurs scènes. Pour ma part, j’aime constituer mes chapitres d’environ 3-4 scènes (je dis 3-4 car leur nombre peut varier d’un chapitre à l’autre : le but étant souvent que tous les chapitres aient, plus ou moins, la même longueur). 

Faut-il forcément une scène dans son roman ?

Non, pas forcément. Je trouve cependant intéressant ce découpage en scènes. Il permet de découper bien plus précisément son roman et d’aller plus loin que le système des chapitres. Pour les auteurs et les autrices débutant·e·s, je trouve qu’il est intéressant de s’y pencher car c’est un bon outil pour penser l’avancée de son roman sur la longueur.

Quels effets produit-on avec l’enchainement des scènes dans un roman ?

L’enchainement des scènes dans un roman peut entrainer différents effets : 

  • Le suspense – quand la scène est coupée au moment où une révélation / un fait important vient d’arriver (les amateurs et amatrices de série repéreront ici le système du Cliffhanger) ;
  • L’apaisement – en commençant une scène par une lente description, vous allez ralentir le rythme de votre récit.
  • Ellipse – Si une scène se termine sur un Cliffhanger et que vous décidez de reprendre beaucoup plus tard, vous créez un trou dans votre intrigue. C’est parfois voulu, par exemple dans le cas d’un roman policier.
  • Flashback – Une scène dans son ensemble peut être un flashback permettant de découvrir quelque chose qui s’est passé en amont de l’histoire, ou pendant l’histoire.

Comment débuter une scène

Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon de débuter une scène, mais je vais vous donner ici des façons « classiques » de démarrer une scène ainsi que des choses à éviter. 

La description

Un classique du début de scène : la description. Du large vers le détail ou du détail vers le large. Comme une caméra dévoile le lieu où va se dérouler la scène, l’auteur·trice peut être tenté·e de démarrer sa scène en donnant une vision du lieu où vont se dérouler les débats à venir. 

Le dialogue

De nombreuses scènes débutent par un dialogue. Le/la lecteur·trice est directement plongé·e dans l’action. C’est souvent pratique car, ne nous le cachons pas, certains débuts de dialogue peuvent parfois être un peu rébarbatifs (« Salut, comment vas-tu ? » « Bien et toi ? »…). Arriver en milieu de dialogue permet aussi d’éviter les redites (quand un personnage raconte à un autre quelque chose que le lecteur a déjà vu).

De façon générale, l’une des difficultés quand il s’agit de commencer ou de conclure une scène est d’éviter 1) les longueurs et 2) les répétitions. Personne n’a envie de lire deux fois la même version d’un fait – à moins que cela n’ait réellement un but dans le récit.

La pensée d’un personnage

Un autre bon moyen pour débuter une scène est de commencer par la pensée d’un personnage. Bien sûr, cela va dépendre du mode de narration que vous avez choisi (n’entrez pas dans la tête d’un personnage alors que vous êtes en point de vue externe…). Cette entrée en matière est très avantageuse si vous aimez les points de vue variés dans votre roman (un chapitre par personnage, par exemple). En effet, cela permet au lecteur de savoir rapidement en présence de quel personnage il se trouve. 

Comment conclure une scène

La fin d’une scène est presque aussi marquante que son début car c’est elle qui va déterminer l’envie de votre lecteur à aller plus loin dans votre roman. Elle débouche en général sur un saut de ligne et demande au lecteur de se replonger dans sa lecture. Souvent, quand je lis un roman, je m’arrête en fin de scène ou de chapitre. Vous aussi, non ?

La description

 Il peut arriver de conclure une scène sur une description. Parfois, il s’agit même d’une boucle avec le début de la scène. Si une bagarre s’est passée, le lieu où la bagarre s’est déroulée est peut-être complètement démoli – à l’opposé de ce qu’il était quand la scène a commencé. 

Le changement de lieu, personnage…

Je vous le disais en entrée de cet article. La scène est souvent pensée comme au théâtre comme une entité fixe – en lieu, en personnage, en thème, en durée… La fin de la scène intervient donc quand cette unité s’apprête à changer (départ d’un personnage, changement de lieu, tombée de la nuit…).

Attention ici : il n’est pas forcément nécessaire d’aller au bout du bout de la scène, quand le personnage quitte effectivement la pièce. A nouveau cela peut entraîner des lourdeurs. Le simple fait que le personnage mentionne qu’il va partir peut suffire à couper la scène.

Les erreurs dans l’enchainement des scènes dans un roman

Comme je vous l’écrivais un peu plus tôt, il n’y a pas de bonne ou de mauvaise façon d’écrire une scène, de façon générale. Mais il existe des défauts assez importants dont j’ai commencé à vous parler en filigrane. 

Les répétitions

Il est courant de faire appel au système des scènes dans une construction de roman. Après avoir vécu X événement avec Emilie, Maria va le raconter à sa mère. Le lecteur était là lorsque l’événement s’est produit… il est donc inutile de lui re-raconter la scène entière. Il s’agit donc de couper la scène de façon à ce que le lecteur n’assiste pas au récit de l’événement (sauf si Maria ment éhontément à sa mère et que cela lui pose problème ensuite…). 

Avec le système de scène et l’alternance des points de vue, il peut en effet être tentant de jouer avec les points de vue et donner plusieurs visions d’un même événement à travers les yeux de plusieurs personnages. Si cela peut-être très intéressant et servir – si c’est bien fait – cela peut aussi être très barbant. Attention. 

Les débuts et les fins qui n’en finissent pas

« Bonjour, comment vas-tu ?
— Et toi ? 
— Bien merci. 
— Merci d’être venu, j’avais réellement besoin de te parler. »

Ici, commencer ce dialogue à « Merci d’être venu, j’avais réellement besoin de te parler » était amplement suffisant 😉

Le rythme de nombreux romans n’est pas bon parce que les scènes ne sont pas coupées là où il faut – souvent un poil trop tôt ou un poil trop tard, d’ailleurs. Lorsque vous écrivez une scène, demandez vous toujours si les premiers paragraphes (et les derniers) sont nécessaires. Souvent, ils alourdissent l’histoire plus qu’ils ne la servent. Pour un bon enchainement des scènes dans un roman, n’hésitez pas à couper un peu, votre texte devrait s’alléger. 

L’utilité des scènes

Une scène – même une scène de transition – doit toujours être utile. Pertinente. Importante. Il n’est pas forcément nécessaire d’y mettre deux bastons et trois scènes de sexe, mais il doit se passer quelque chose. 

En vrac : 

  • La compréhension du caractère d’un personnage
  • L’avancée de l’intrigue principale
  • Le renforcement de la relation entre deux personnages
  • L’avancée d’une intrigue secondaire

Attention aux scènes qui sont là pour être là. Elles créent souvent des longueurs dans votre texte et peuvent perdre le lecteur.

Un morcellement du texte

Je suis tout à fait en mesure de vous parler de cette erreur car… je suis la première à la faire. Trop concentrée sur mon plan détaillé et son suivi, j’oublie parfois de faire le lien entre les scènes et c’est ce qui crée des personnages peu attachant qui avancent dans l’histoire un peu tristement. 

Bref. 

Prenez bien le temps de créer chacune de vos scènes et de leur attribuer un décors et des personnages. N’obéissez pas seulement à votre plan et à l’avancée de votre intrigue, n’oubliez pas l’évolution de vos personnages.

Mon défaut est parfois de suivre tête baissée mon plan, au détriment de l’ajout d’une scène complémentaire qui pourrait donner du corps à mes personnages. Je suis de plus en plus consciente de ce problème et c’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai décidé de laisser tomber mon plan détaillé pour les corrections de mes romans… A suivre 😉


Le développement des scènes et leur enchaînement est une compétence à maîtriser pour rendre votre livre inlâchable.

Je ne peux que vous inviter à tester la méthode des scènes pour constituer le contenu de vos chapitres : dites-moi si ça fonctionne pour vous pour étoffer et organiser votre roman 😉

Avez-vous d’autres questions sur les scènes ? Les utilisez-vous déjà dans vos romans ou vous laissez-vous porter uniquement par l’entité chapitre ?

A très vite, 

Marièke 

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8 comments

Ed 6 mars 2020 - 16 h 06 min

Article vraiment complet (enfin je pense). En ce qui me concerne, j’adore débuter une scène par un dialogue. Rapide, efficace et agréable pour le lecteur.

Reply
ANTALL 15 mars 2020 - 8 h 18 min

bonjour Marièke, cela fait un moment que je n’ai pas visité ton blog, même si je suis les publications que je reçois régulièrement par la newsletter. Article très intéressant qui devrait répondre aux blocages de nombreux auteurs. pour ma part, après huit nouvelles, une pièce de théâtre, une dizaines de scénarios courts et mon cinquième roman en cours de correction (aventure, espionnage, thriller), je m’inspire souvent des séries télé où le travail des scénaristes (et des metteurs en scène) a considérablement gagné en subtilité depuis quelques années. selon moi, la mise en scène est primordiale dans la façon d’aborder une scène (savoir ce que l’on veut y exprimer, l’ambiance à donner, le personnage à valoriser, etc). Mais ce qui l’est encore davantage, ce sont les MOTIVATIONS DES PERSONNAGES. aucune scène n’a lieu d’être écrite sans qu’un personnage n’ait besoin de la faire exister. l’auteur doit donc créer un tissage subtil, qui les relie sous la surface afin de donner un tout cohérent et rythmé. Pas facile ! ensuite, il y a le travail de l’auteur sur la structure, pour les imbriquer de façon à scotcher le lecteur, mais ce sont là des secrets de fabrique qui relèvent d’une autre catégorie d’articles.
Encore bravo pour ton blog truffé de pépites et au plaisir d’échanger avec toi !
Je t’invite à me donner tes impressions sur LIGNE DE FAILLE disponible à la lecture gratuite sur monbestseller.com
bien amicalement
NORIN ANTALL

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fred bell 13 juin 2020 - 9 h 42 min

Bravo, ton commentaire a complété utilement l’article. Bises.

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Le Casual 12 avril 2020 - 14 h 03 min

Bonjour, tout d’abord merci pour ton article.
Je m’essaie en ce moment à l’écriture sur des sujets simples tout en écrivant de temps à autre des articles sur mon blog. J’ai une question par rapport aux scènes dans un roman : si ce que l’on écrit n’est pas une scène, de quoi s’agit-il ? Par exemple, est-ce que le monologue intérieur d’un personnage correspond à une scène ?

Merci pour tes éclaircissement.

Le Casual

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Marièke 1 mai 2020 - 11 h 06 min

Bonjour 🙂 J’ai tendance à envisager la scène comme une unité de temps, de sujet ou de lieu 🙂 Ainsi, un monologue peut effectivement être une scène. Après, une scène est un outil de conception de texte : tou·te·s les auteur·trice·s l’utilisent à leur façon 🙂

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BOUTRY 23 avril 2020 - 13 h 59 min

Bonjour,

J’ai une question concernant le flash back. Dans mon roman l’héroïne (Himiko) est plongée dans les souvenirs de son père (Hiro). Mon texte est du point de vue interne avec utilisation du « je ». Est-ce que je peux garder ce point de vue lors du flash back sachant que du coup ce n’est plus Himiko mais son père Hiro qui parle dans ce chapitre.

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Marièke 1 mai 2020 - 9 h 01 min

En vrai, tu peux tout faire 🙂 C’est l’avantage de l’écriture. Ce dont il faut juste t’assurer c’est que :
1. ce changement de « JE » soit compréhensible pour le lecteur
2. chaque personnage ait sa propre voix : si les deux personnages parlent de la même façon ça risque d’être raté 🙂

Reply
BOUTRY 23 mai 2020 - 9 h 23 min

Merci pour votre réponse 🙂 Du coup je vais garder mon « je » et faire attention que le lecteur ne soit pas perdu et faire attention à leur façon de parler 🙂

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