Bonjour à toutes et à tous,
J’espère que vous et vos proches allez bien et que le confinement se fait sous un voile créatif qui vous permet de l’adoucir un peu 🙂 Par ici, je continue ma routine : écriture et articles le matin tôt, travail en journée et vie perso le soir. Les journées se ressemblent et il m’est un peu difficile de réaliser les semaines qui s’écoulent : comment vivez-vous ce rapport bizarre au temps ?
Aujourd’hui, pour se changer un peu les idées, on va parler d’écriture et de réécriture / corrections. Comme vous avez pu le voir dans le titre, je vais vous parler de prendre du recul avec ses écrits. Si ce n’est pas forcément aisée à faire, cela a pourtant de nombreuses vertus. Elle est même indispensable dans certains cas.
Prendre du recul avec ses écrits : c’est quoi ?
Prendre du recul avec son récit, c’est réussir à s’en détacher à la fois littéralement – s’en éloigner physiquement – mais aussi émotionnellement.
En effet, quand je parle de prendre du recul, cela peut tout aussi bien correspondre à enfermer votre texte dans un placard (j’évoquerai vraiment cette solution) que parvenir à penser à autre chose.
Quelle que soit la raison pour laquelle votre texte vous hante, nous allons en parler. Plus encore, on va essayer d’y trouver une solution. D’une part pour qu’il ne vous hante plus, et d’autre part pour que vous puissiez comprendre pourquoi ça a dérapé.
Prendre du recul avec ses écrits : en quoi est-ce bénéfique ?
Prendre du recul avec ses écrits n’est pas nécessaire si vous « vivez bien votre texte ». Si vous parvenez à l’écrire ou à le réécrire sans éprouver de difficulté alors vous n’avez pas à le faire. Cette solution va plutôt être préconisée quand vous :
- sentez que votre texte n’est pas parfait mais qu’après 10 relectures, vous ne savez pas par quel bout le prendre pour l’améliorer ;
- éprouvez de la difficulté à travailler sur votre texte : difficulté morale (votre texte vous procure de la souffrance) ou technique (vous n’arrivez plus à avancer l’écriture ou les corrections, vous êtes bloqué·e) ;
- ressentez de la difficulté face aux critiques / remarques que l’on peut vous faire – par exemple lors d’une bêta-lecture
Ces émotions, vous en conviendrez, ne sont pas positives et ne permettent pas d’écrire sereinement. C’est à ce moment-là que prendre du recul va devenir à la fois pertinent et bénéfique.
Cela va permettre de :
Rendre la critique plus facile
En prenant du recul, l’objectif est que vous ne vous sentiez plus directement agressé·e par une critique. Cela vaut pour vous-même (l’exercice des corrections sera facilité si vous acceptez d’avoir pu écrire un paragraphe de moins bonne qualité par exemple) ou pour votre bêta-lecteur·trice (la critique fera moins mal).
Rendre l’écriture plus facile
Si vous parvenez à comprendre les raisons qui font que votre texte vous procure un malaise voire une souffrance, vous arriverez certainement à en envisager plus sereinement l’écriture. Voire vous accepterez de travailler sur un autre texte, moins traumatisant pour vous.
Rendre la correction plus facile
Ce dernier point regroupe les deux précédents. En vous permettant de mieux accepter la critique et de prendre une nouvelle bouffée d’air frais, la prise de recul ne peut que faciliter l’acte de corrections / réécriture.
4 solutions pour prendre du recul avec ses écrits
J’espère qu’il y en aura une pour vous 🙂
#1 Enfermer son texte dans un placard
C’est la première solution.
Celle de l’éloignement total, physique et émotionnel. Lâcher son texte. L’enfermer dans un tiroir ou dans un dossier de son ordinateur et ne plus y toucher.
Si cela a l’air évident, il n’est pas si simple que cela de quitter un texte qui nous a habité des mois durant. Plus encore, cette solution sera efficace dans certaines limites uniquement.
- Fixez-vous un délai : il y a trop de textes qui finissent leur vie au placard. Donnez-vous un délai – 1 mois, 6 mois, 1 an – et notez-vous quelque part de reprendre votre texte. Il est aussi possible que la reprise se fasse naturellement, quand votre texte vous appellera.
- Ne mettez pas votre texte au placard à la première difficulté ! Si vous êtes coutumier·e du fait d’abandonner un texte, évitez de tout lâcher dès la moindre difficulté 🙂 Il est possible que prendre du recul soit une bonne solution MAIS que ce ne soit pas l’éloignement total qui vous corresponde. Regardez au point suivant (le #2), il devrait vous intéresser.
#2 Prendre du recul avec l’écriture
Dans certains cas, prendre du recul avec son texte ne veut pas dire prendre du recul avec l’ensemble de son texte, mais bien uniquement l’acte d’écrire.
Si vous vous retrouvez dans une situation compliquée face à votre texte – il ne sort pas, il ne s’écrit pas – il est possible que ce soit parce que vos personnages ne sont pas clairs dans votre texte ou parce que votre intrigue n’est pas bien définie.
Auquel cas, je ne peux que vous conseiller d’aller regarder de mes articles sur la planification (la méthode flocon et la méthode de planification en 10 étapes notamment) ainsi que mes articles sur le blocage.
Tout blocage d’écriture ne devrait pas se conclure par une mise à l’écart complète de votre texte.
#3 Se distancer émotionnellement de son texte
Parfois, enfermer son texte dans un placard n’est pas suffisant. Au delà de la séparation concrète et physique, il faut parvenir à se distancier mentalement pour réussir à faire le vide.
Pour cela, deux idées me viennent instantanément :
- Commencer un nouveau projet littéraire : en pensant à un nouveau texte, vous allez mettre de la distance avec le projet actuel. Vous pouvez retrouver mon article sur Travailler sur plusieurs projets en même temps pour vous inspirer.
- Poursuivre un nouvel objectif, découvrir un nouveau loisir : si vous êtes bloqué·e sur un projet littéraire en particulier et que celui-ci ne fonctionne pas, pour telle ou telle raison, s’en détacher en se concentrant sur un nouveau projet peut être une belle solution. Se mettre à la cuisine, apprendre une nouvelle langue – et que sais-je encore ! – sera un bon moyen pour vous en éloigner et revenir à son chevet plus prêt·e.
#4 Supprimer l’affectif
Si la prise de recul a besoin d’être émotionnelle et que l’écriture de votre texte est vraiment lourde pour vous, le simple éloignement physique ne sera pas suffisant. S’il vous permettra de voir votre texte sous un nouveau jour, cela ne vous permettra pas de vous en détacher émotionnellement : à la minute où vous vous reconnecterez à lui, vous souffrirez à nouveau.
Pour délester un texte de sa charge émotionnelle, plusieurs solutions.
Travailler et finaliser un autre texte avant celui-ci
La charge d’un premier roman est souvent immense. Recommencer et terminer les corrections d’un autre texte permet parfois de rendre votre premier texte plus accessible. La charge affective s’en trouve diluée et plus facile à gérer.
Couper les passages trop émotionnels
Lorsque l’on travaille sur un texte, il arrive que certains passages (dialogues, description, scène…) soient nos chouchous. Des moments que l’on adore et qui, pourtant, n’apportent rien au texte.
Les supprimer est souvent le meilleur moyen de retravailler son texte.
Pour y parvenir, une solution : les couper-coller dans un autre document. Au cas où. (Spoiler alert: vous n’en ferez certainement rien mais au moins ne seront-ils pas perdus : c’est rassurant et vous pourrez compléter votre texte avec cette impression positive.)
Changer de sujet principal
Une erreur fréquente des jeunes auteurs et autrices est de commencer leur carrière d’écrivant·e par une auto-fiction.
Or ce choix est souvent dangereux tant l’auto-fiction n’est pas aisée à maitriser et tant le sujet vous est proche et sensible.
Plus largement, si votre premier roman aborde une thématique sur laquelle vous n’êtes pas encore prêt·e, préférez travailler sur un autre projet, en attendant. Ce n’est pas l’écriture qui bloque. C’est vous.
Écrire pour quelqu’un d’autre
Enfin, il est possible que tous vos projets soient chargés émotionnellement. Et ce, non à cause du sujet, mais bien à cause de vous et du manque de confiance en vous que vous avez. Cela peut venir de deux causes : soit vous craignez les critiques car elles vous font du mal, soit parce qu’elles blessent votre ego. Toujours est-il qu’elles vous font mal et rendre l’écriture et la confrontation (je dis « confrontation » volontairement car c’est une bagarre) au public compliquée.
Pour contrecarrer cette impression désagréable, je vous encourage à détacher le texte de vous et à écrire pour quelqu’un. Pliez-vous à ses envies, à ses contraintes.
J’ai fait cette expérience dans mes années de journalisme et la fait encore aujourd’hui en tant que rédactrice web et cela me permet d’aborder l’écriture plus sereinement.
Dans le cadre de la fiction, essayez par exemple de vous plier aux codes d’un genre littéraire (la romance, le policier…), d’une maison d’édition que vous appréciez ou encore d’une fiction déjà existante (en faisant des fanfictions par exemple). Ces expériences atténueront l’impression que l’écriture émane de vous et vous enlèveront tout la responsabilité de vos textes vous permettant de mieux les gérer.
Prendre du recul sur un roman et plus largement sur l’écriture est loin d’être évident. Comme je l’écris en introduction de mon guide Les douze peurs de l’écrivain·e, l’acte d’écriture même est source de peurs et d’inconfort. C’est parvenir à écrire dans la sérénité et malgré ces peurs et cet inconfort qui va faire de vous un·e meilleur·e auteur·trice. C’est ce qui va rendre votre livre et votre texte meilleur.
J’espère que cet article vous aura aidé à poser des mots (et des solutions) sur les problématiques qui vous habitent aujourd’hui envers votre texte.
Très belle fin de semaine,
Marièke
2 comments
Actuellement je suis toujours en phase d’écriture (si je me fie à ma frise chronologique je suis à peu près au tiers). Quand j’aurais fini, je pense laisser reposer environ trois mois, pour pouvoir regarder les choses d’un œil neuf. Ce que je trouve encourageant c’est que, à force d’écrire tous les jours depuis trois mois, j’ai l’impression que je suis capable, en phase d’écriture, de prendre du recul sur ce que j’écris et de savoir si c’est bien ou pas. Peut-être aussi que c’est parce que j’écris des projets plus légers et pas sérieux à côté et que, comme le style et ce que je mets dedans sont moins aboutis, ça me permet d’avoir un point de comparatif. Je ne sais pas trop… en tout cas prendre du recul pendant que j’écris me permet de me dire que ma relecture après jachère sera vraiment enrichissante !
Coucou ! C’est cool si tu arrives à prendre du recul et à te maitriser pendant que tu écris ! Après si tu écris plusieurs projets en même temps, ça peut arriver que l’un déteigne sur les autres 🙂 Tu verras à la réécriture mais ne te mets pas de pression pour le moment !