Ecrire une scène de sexe : on en parle sans tabou

by Marièke

Bonjour à toutes et à tous,

Un article qui, je le sais, vous aidera et qui a finalement été plus facile à concocter que ce que je ne craignais. J’avais imaginé le faire en vidéo et puis je me suis dit que je ne serais pas assez à l’aise – c’est donc par article que je vous propose ce contenu !

Belle découverte !


Écrire une scène de sexe : dans quels romans ? quand ?

Au moment de vous lancer dans cet exercice, plusieurs choses doivent vous questionner sur la nécessité des détails à glisser dans vos scènes de sexe.

Selon le genre littéraire

Si vous vous lancez dans un roman érotique ou pornographique, c’est évident : le sexe devra être présent et les scènes de sexe ne devront pas être éludées. À l’opposé, si vous visez une littérature jeunesse voire young adult, le sexe sera soit absent soit caché dans votre livre.

Dans les autres genres : littérature blanche, romance, sf, historique, policier, thriller et j’en passe, il n’y a pas de règle établie. D’autres critères pourront entrer en jeu.

Selon vous, votre style

Bien entendu, vous avez votre mot à dire en tant qu’auteur·trice. Si certain·e·s aiment et sont à l’aise à l’idée d’écrire des scènes de sexe, d’autres ne souhaitent pas le faire.

Dans ce deuxième cas, faire appel à l’ellipse ou à la métaphore est une bonne solution. Tout va dépendre de votre style et de votre façon d’aborder le sujet. On reparle des figures de style un peu plus bas !

Selon l’histoire que vous racontez

Enfin, certaines histoires appellent à traiter le sujet tandis que d’autres, pas du tout.

Si votre livre a pour thème la virginité subie d’un personnage, le passage à l’acte sera forcément à décrire d’une manière ou d’une autre.

A contrario, si votre livre décrit les élevages d’escargots en Basse Provence, le sexe n’y aura pas forcément de place centrale et vous pourrez choisir ou non d’en parler.

Écrire le sexe : Comment ? Quelques figures de style et autres réflexions

L’approche factuelle

Certains auteurs et autrices optent pour une approche extrêmement factuelle. Je pense notamment à Ken Follet (notamment dans son roman Les piliers de la terre) : les scènes de sexe (et de viol, on est au Moyen-Âge…) de ce roman sont hyper précises et détaillées.

L’ellipse

D’autres auteurs et autrices vont préférer utiliser l’ellipse. Soit pour effacer entièrement la scène – on comprend que les personnages vont avoir un rapport sexuel mais on ne le voit pas, soit pour éluder uniquement le moment du coït (je pense par exemple à la nouvelle XXX de Haruki Murakami dans XXX).

Les autres figures de style

Il existe des dizaines de figures de style et toutes peuvent être choisies pour écrire le sexe. La métaphore est très usitée pour cacher sans cacher. La personnification est parfois utilisée : « les doigts qui courent », « la verge qui se lève » et j’en passe 😉

Ecrire une scène de sexe crédible

C’est une question que j’ai déjà croisée et l’une des recherches les plus importantes sur Google en matière d’écriture de scène de sexe.

Plusieurs pistes de réflexion à suivre.

Adaptez l’écriture et les pratiques au genre de votre roman

Je me répète un peu par rapport au début de cet article, mais tout va déprendre de votre genre et de votre histoire.

Si vous êtes en plein roman porno, la crédibilité est plus « flexible » (sans mauvais jeu de mots). Disons que votre lectorat s’attendra à des prouesses, à des positions et à des scènes spécifiques. Vous aurez bien plus de liberté en matière de pratiques et de style.

Dans la même idée, pensez à harmoniser votre scène – pratiques et style – avec le style de votre roman. Si vous étiez jusqu’ici dans un roman très prude, une scène de sexe bien grasse risque de surprendre un peu votre lectorat XD

N’hésitez pas à faire relire votre scène si vous doutez

Lors d’un atelier d’écriture auquel j’ai eu l’opportunité de participer, j’ai eu l’occasion d’écouter une scène de sexe écrite par l’un des participants au sein d’une romance historique.

Il se trouve que la notion de consentement n’y était pas particulièrement respectée : le personnage féminin disait « non » à deux (voire trois) reprises avant de « céder » au personnage masculin… Je n’ai pas pu m’empêcher de le signaler à l’auteur et de lui faire part de mon malaise face à cette scène.

À vrai dire, il doutait de sa scène. Lui avoir signalé mes doutes lui a permis de réviser sa copie : il a supprimé la relation sexuelle à cet endroit du texte pour l’ajouter plus tard, quand la protagoniste était prête à se dévoiler.

Les particulières questions du consentement et du viol

Le point précédent m’oblige à évoquer ces questions.

Il n’est bien entendu pas interdit d’écrire sur le viol ou l’absence de consentement.

J’ai découvert qu’il était désormais proposé de signaler les scènes de sexe ou de viol dans un roman pour en avertir en amont le lectorat. Si on le fait pour les scènes de sexe, ce serait pas mal de le faire aussi pour les scènes de meurtre ou de décès – qui peuvent aussi mettre mal le lectorat.

En l’absence d’une réelle législation quant aux avertissements (comme les -12, les -16 et les -18 pour les films) que c’est à l’auteur·trice de décider s’il souhaite mettre un avertissement au dos de son livre concernant les scènes pouvant déranger. Vous décidez 🙂

Écrire une scène d’amour : mon expérience avec Des hommes et des médias

Dans le dernier roman que j’ai complété il y a un an, Des hommes et des médias, la rédaction de cette scène a été assez compliquée pour moi.

Il s’agissait d’un roman de littérature générale : j’étais donc assez libre quant à l’ajout d’une scène de sexe. Cependant, mon personnage principal ayant subi un viol par le passé, il m’a rapidement semblé essentiel, au moment de la réécriture, d’ajouter une scène de sexe – tant la question du sexe dans une nouvelle relation après un viol ne peut être éludée.

J’ai mis pas mal de temps à l’écrire : j’ai fait une première tentative pendant la réécriture, puis à plusieurs reprises ensuite. C’est finalement la scène que j’ai écrite en dernier, à la toute fin de ma réécriture – quand j’en étais au peaufinage des détails.

J’ai fait le choix d’une scène assez descriptive mais toute en pudeur, dans le même style que le reste du roman. Je ne voulais pas qu’il y ait un décalage entre cette scène et les autres.

C’était finalement assez compliqué car :

  • C’est intime – pas besoin de dire pourquoi XD
  • C’est un peu gênant d’imaginer sa famille la lire…
  • Ce n’est pas un sujet sur lequel j’ai l’habitude d’écrire ou que j’ai l’habitude de lire (je ne lis pas d’érotique). Jusqu’ici, j’avais toujours éludé la question quand elle arrivait (merci la fameuse ellipse)

Pour dépasser ces limites, j’ai essayé de coller le plus possible au style du reste de mon roman tout en regardant la scène du point de vue de mes personnages.


Si j’ai un peu moins cadré cet article par rapport à d’autres – j’ai eu l’impression de vous lancer plein de pistes ! – j’espère avoir quand même pu vous aider !

Belle écriture !

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10 comments

Jean-Jacques G. 20 septembre 2020 - 15 h 01 min

C’est un vrai problème, tu fais bien de le poser. J’aurais tendance à penser que
a) ça n’a rien d’une obligation absolue, beaucoup d’histoires s’en passent très bien;
b) il faut que ça soit vraiment inséré dans le récit: que la rencontre qui devient physique le justifie vraiment & que les effets psychologiques ultérieurs soient intéressants (ça peut être la déception ou l’envie de gommer l’épisode…);
c) qu’on réussisse à éviter les clichés insupportables (il y a un prix littéraire parodique qui « récompense » les scènes et descriptions sexuelles les plus nulles, abracadabrantes, involontairement sordides…, dans la littérature sérieuse, dite blanche je crois) sauf évidemment si on écrit du porno;
d) qu’après tout pourquoi les relations sexuelles seraient-elles toujours torrides ou intenses, mais pas comme dans la vie, parfois sympas sans plus, ou même bof bof. Ce qui peut très bien convenir à l’histoire qu’on raconte.

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Marièke 30 décembre 2020 - 19 h 23 min

J’aime ton d) : il est vrai qu’on a tendance à se focaliser sur les extrêmes et que ce n’est pas toujours la vie 🙂

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Enirtourenef 22 septembre 2020 - 7 h 58 min

Cet article lance des pistes intéressantes qui me serviront sans doute (donc merci :D) mais pas tout de suite ! Déjà, mes histoires ne s’y prêtent pas forcément, ou alors je peux m’en sortir avec une ellipse, et puis je ne suis pas non plus aidée par le fait que… je suis vierge. Donc, même si on peut écrire quelque chose sans avoir eu d’expérience dessus, bien sûr et c’est heureux, ben là… pour le coup… c’est compliqué x) Surtout que je suis comme toi et ne lis pas d’érotique, donc je ne suis pas ce qui se fait. Autant je regarde et lit suffisamment de romances ou d’ouvrages contenant des romances même si ce n’est pas le sujet principal pour en comprendre les rythmes, les constructions, etc., et pouvoir tenter d’en écrire à mon tour, autant je ne lis jamais de policier, par exemple, donc je serai bien incapable d’en écrire. Du coup, pour le sexe ben… c’est pareil ! Donc c’est pas pour tout de suite qu’on va en trouver dans ce que j’écris x)

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Marièke 30 décembre 2020 - 19 h 22 min

Comme je le dis dans l’article, tout va dépendre aussi du genre et des âges pour lesquels tu écris ! Et de nombreux livres n’ont pas ce type de scène ! Donc c’est loin d’être un problème de ne pas en écrire 🙂

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Lovise 22 septembre 2020 - 20 h 30 min

Encore une fois très intéressant, cet article. Plus qu’intéressant : pragmatique. Je le reconnais, l’idée qu’un jour quelqu’un de ma famille, surtout si c’est un proche, devait lire de ma plume une scène de sexe me gêne.
Au-delà de cela reste la très intéressante question de savoir si c’est utile ou pas, nécessaire ou non. Je suis du genre à utiliser des ellipses. Dans mon histoire en cours, j’ai du mal à trancher sur l’opportunité d’une scène détaillée. Pour l’héroïne, il y a eu un mariage imposé. La première fois est donc très importante pour elle. Reste que ce n’est pas mon truc et qu’en outre, si je me place cette fois du point de vue de la lectrice, ce genre de scène, quand j’en trouve, m’ennuie. Je trouve généralement que c’est du temps perdu (d’où mon goût pour l’ellipse). Mais je vais peut-être reconsidérer la question en me basant sur cet article.

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Marièke 30 décembre 2020 - 19 h 12 min

Merci pour ton retour !
Dans le cadre de ton récit, avec les infos que tu me donnes, je me dis que cela peut effectivement intéressant car cela va permettre aussi de voir les bases de sa future relation maritale – respect du mari ou non, échanges ou non… plus que l’acte en lui-même, il y a aussi l’avant et l’après.

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Christelle 4 octobre 2020 - 12 h 25 min

J’aime beaucoup cet article 😉 J’écris des romances et ayant lu beaucoup de harlequin plus jeune, j’ai du mal avec les figures comme l’ellipse. J’aime que les scènes soient bien décrites sans pour autant aller dans le style roman érotique. Malgré tout, je n’imagine pas un membre de famille plus âgé le lire, je ne suis pas du tout à l’aise avec ça 😁
Bon dimanche

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Marièke 29 décembre 2020 - 18 h 07 min

Ahah, c’est sûr XD Mais si tu aimes le détaillé alors autant faire du détaillé !

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Liadan 2 novembre 2020 - 17 h 40 min

J’ai beaucoup apprécié cet article car c’est un sujet un peu épineux pour moi. Je n’ai jamais réellement eu de relation consentie avec un homme, alors j’ai beaucoup de difficultés à écrire là-dessus (surtout, si cette scène doit être lue plus tard par un membre de ma famille !). Mais quoi qu’il en soit, j’ai lu plusieurs trucs et le style trop détaillé, trop explicite ne me convient pas vraiment. Je n’arrive donc pas à écrire correctement de la façon dont j’aimerai rendre. Parce que l’un de mes personnages principaux est une prostituée, alors je voulais justement écrire une première scène de sexe avec elle pour faire mieux partager le ressenti du personnage par rapport à sa vie. Et je voulais justement aborder tout ça, vis-à-vis de ce personnage qui d’abord voit les rapports sexuels comme un viol et petit à petit, finira par considérer les choses autrement. C’est donc très compliqué pour moi. Et là, encore, le regard de ma famille me paralyse entièrement 🙁

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Marièke 29 décembre 2020 - 17 h 43 min

Bonjour ! Je comprends complètement.
Deux solutions :
1/ ce roman n’est peut-être pas assez mûr pour être écrit ? Il peut parfois être intéressant de faire une pause et d’écrire autre chose. Tu pourras y revenir quand tu seras prête.
2/ si tu te sens prête, la deuxième solution est de te lâcher et de prendre un pseudo pour éviter le regard de ta famille 🙂

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