Talent VS travail : que faut-il pour écrire un livre ?

by Marièke

Bonjour,

Et déjà, désolée pour les soucis d’accès au site ces deux derniers jours : j’ai bêtement oublié de repayer mon hébergement / nom de domaine. Erreur de débutante ^^’ Le temps que tout se remette d’aplomb, le site est resté hors ligne !

Aujourd’hui, j’avais envie de me poser avec vous pour discuter d’un sujet qui m’est cher : écrire un livre, est-ce le résultat de talent ou de travail ? J’ai souvent évoqué sur ce blog mes réflexions à ce propos, mais je n’ai jamais pris le temps d’y consacrer un article. C’est désormais fait 🙂

*****

Deux visions opposées de l’écriture

Dans cet article, je vais opposer deux visions de l’écriture : la vision que je vais appeler française et la vision que je vais qualifier d’américaine. La première est une vision élitiste, la seconde, méritocratique.

L’écriture, un talent

La vision française de l’écriture est simple : savoir écrire est lié au talent, cela ne s’apprend pas, c’est un don que l’on a, ou pas. L’écrivain est dépeint le plus souvent comme un homme, un loup solitaire, attablé devant sa table de travail en robe de chambre et pour qui l’inspiration arrive au détour d’une bouteille de vin. Son talent lui vient de son intérieur profond, d’un amour insatiable (ou d’une haine insatiable d’ailleurs) pour l’être humain. Il est envisagé comme un artiste incompris, avec le même romantisme que des peintres au destin tragique comme Vincent Van Gogh.

Bien sûr, mon trait est un peu caricatural. Mais pensez aux écrivains que le collège et le lycée nous font découvrir. Victor Hugo, génie engagé traumatisé par la mort de sa fille. Guy de Maupassant, coureur de jupons devenu fou comme son frère. Arthur Rimbaud, mort à la guerre. Saint Exupéry, mort à la guerre. Ferdinand Céline, au destin controversé. Emile Zola, réaliste engagé.

Et ainsi de suite.

La majorité de nos écrivains français dit « classiques » sont avant tout des aventuriers que la vie (souvent dramatique) a poussé à l’écriture. L’acte simple de l’écriture (s’asseoir devant un ordi et/un bureau pour poser des mots) est largement oublié – si ce n’est pour Balzac donc on explique souvent qu’il était payé à la ligne.

L’écriture, un travail

À l’opposé de cette vision romantique de l’écrivain, il y a  la vision américaine : tout le monde peut devenir écrivain, c’est une simple question de méthode et de travail.

La preuve : les cours de creative writing proposés par les universités. Construire une intrigue s’apprend, de même que le style et la création de personnage. Issus du modèle américain, on retrouve de plus en plus de guides pour écrire le best-seller de l’année ou le livre qui va plaire.

Mon blog s’inscrit en partie dans cette mouvance : tout le monde peut écrire, il suffit d’essayer et d’y travailler 🙂 (C’est pour propager ce message que j’ai notamment commencé à écrire et il m’a été quelques fois reproché d’être trop « anglo-saxonne » dans ma démarche.) Je dis « en partie » car je me refuse qu’il existe une méthode de travail ou un solution miracle d’écriture. D’une part, parce que si elle existe, je ne l’ai pas encore trouvée. Et d’autre part, car je pense que le talent (pour l’utilisation des mots et pour sentir les tendances sociétales) a tout de même une part importante dans l’écriture d’un bon livre.

L’écriture, un alliage compliqué de talent et travail

Depuis quelques années, la vision française s’est beaucoup édulcorée. Les ateliers d’écriture se développent, le NaNoWriMo a pris de l’ampleur. Je pense que cela est dû à l’américanisation (ah, la fameuse mondialisation de l’information et de la culture) de notre monde et pour ce cas spécifique en tout cas, je trouve que cela est positif. La vision américaine désacralise l’écriture, casse son côté élitiste et pourrait permettre, à terme, de donner la parole à des personnes qui, sans cette ouverture, ne l’auraient jamais prise.

Plus encore, l’écriture est, pour moi, un mix entre le talent et le travail.

Le talent d’abord, car il en faut pour:

  • Construire des intrigues,
  • Imager joliment,
  • Imaginer et écrire des personnages vivants,
  • Décrire poétiquement,
  • Plus largement, pour trouver son style et sa voix d’auteur·trice.

Le travail ensuire, parce qu’écrire c’est :

  • Passer des heures seul·e à seul·e avec son ordinateur
  • Se torturer la tête pour trouver des solutions
  • Écrire et raturer
  • Corriger
  • Réécrire, jusqu’à dix fois un même texte

Le talent seul, sans travail, ne permettra à personne d’écrire un roman entier. Les plus belles premières pages du monde ne sont rien tant qu’elles ne sont pas accolées à une histoire complète.

À l’opposé, le travail seul peut permettre d’achever un texte – voir même de le publier. Je suis persuadée qu’en créant une intrigue simplissime avec des personnages simplissimes et un style simplissime, on peut générer un texte assez efficace et accrocheur pour être publié. Mais sans une pointe de talent, il me semble cependant que le livre ne marquera pas son époque.

Pour aller plus loin

J’ai envie de conclure cet article sur deux pensées :

  1. Pour vous améliorer en écriture, il n’y a pas 36 solutions. Écrire est la base. Ceci étant dit, n’hésitez pas à vous inspirer des méthodes d’écriture existantes pour trouver celle qui vous convient le mieux. Sur le blog, j’ai notamment parlé de la méthode flocon et de ma méthode pour créer le plan d’un roman.
  2. N’écoutez pas les personnes qui vous disent que vous n’avez pas le talent d’écrire. Le talent seul n’a jamais fait publier personne. Ce qu’il vous faut, c’est travailler.

*****

Que pensez-vous de ces réflexions ? Les avez-vous expérimentez par vous-même ? Quelles sont vos propres pensées par rapport à ces réflexions ? Je serai curieuse d’avoir votre avis et de savoir si vous avez déjà ressenti la pression de la vision élitiste des écrivain·e·s français·es. ?

Bonne écriture et bon weekend !

Marièke

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26 comments

William Kisasondi 16 février 2019 - 13 h 22 min

Bonjour Marieke,
Certes, il faut du travail pour écrire et terminer son ouvrage. Mais j’aime à penser que lorsque mes lecteurs complimentent mon livre, c’est un peu moi et mon talent qu’ils félicitent et non seulement mon labeur.
Pour ma part, comme ma façon d’écrire est un peu anarchique, le premier jet doit à mon travail le fait d’être terminé mais à mon talent les idées qui orientent mon histoire et qui me viennent au fil des séances que je m’impose. La réécriture, par contre, je le vis essentiellement comme un labeur harassant mais pourtant nécessaire.

William

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Marièke 23 février 2019 - 15 h 54 min

Oui, je comprends ta réaction. Il y a un côté péjoratif derrière les mots travail, labeur ou encore bosseur. Génial et talentueux sonnent beaucoup mieux 🙂 Mais je pense que ça aussi est lié à notre culture française. Les valeurs du talent et de la douance sont plus valorisées que celles du travail.

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Marie d'Anjou, auteure 16 février 2019 - 14 h 49 min

Bien contente que l’Europe s’ouvre enfin à l’idée de travail pour les arts. Les cours de création littéraire existent depuis longtemps c’est vrai, mais j’ai compris récemment seulement qu’il s’agissait d’une tendance nord-américaine. J’ai le plaisir d’avoir étudier dans ce domaine et ça m’a fait développer mon style d’autant plus. Le regard critique de pairs et de lecteurs est excessivement formateur. Il ne s’agit plus de se dire : mes collègues seront mes juges, mais bien mes lecteurs le seront. Ça démocratise l’art, je pense. Ça le désélitise.

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Marièke 23 février 2019 - 15 h 56 min

Désélitise, démocratise et désacralise 🙂 Je trouve ça bien aussi. Je suis persuadée que cela peut donner la parole à des gens qui n’osent pas encore la prendre.

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Caroline 16 février 2019 - 15 h 32 min

Article très intéressant. Je trouve la vision française bien triste. Il est évident que seul le travail paie. Je rajouterai que la passion est également important car ma passion pour l’écriture et la littérature me pousse à avancer. Je trouve bien que tu dises qu’il ne faut pas écouter les gens qui vous découragent d’écrire. Malheureusement, certaines personnes les écoutent par manque de confiance en soi. Je voulais te demander ton avis : penses-tu qu’il faut un haut niveau de connaissances en littérature pour être une bonne autrice ?
Bon week-end

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Marièke 23 février 2019 - 16 h 00 min

Ta question pourrait faire l’objet d’un article entier !
Je pense que l’écriture est comme tous les arts : il faut en connaître les bases et les règles pour pouvoir les briser 🙂 Du coup, une connaissance de la littérature est un gros plus pour réussir il me semble.
Après, que signifie « haut niveau de connaissances en littérature » ? Le problème, c’est qu’on hiérarchise souvent la littérature : il y a la littérature générale en haut et les littératures de genre (romance, fantasy, fantastique…) en bas.

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Jocelyne Parassols 16 février 2019 - 16 h 35 min

Article intéressant dommage que la vision française soit restreinte au talent, car je pense que s’il y avait davantage d’ateliers il y a 30 ans ça m’aurait aidé. J’aimerais savoir s’il est nécessaire d’avoir un haut niveau de connaissance en littérature pour être une bonne autrice ? Merci pour ce que tu fais et ce que tu partages. J’aime bien tes articles. Continue. Jocelyne

Reply
Marièke 23 février 2019 - 16 h 01 min

Bonjour Jocelyne, c’est drôle que tu me poses cette question : Caroline m’a posé exactement la même juste en dessous !
Ma réponse : Ta question pourrait faire l’objet d’un article entier !
Je pense que l’écriture est comme tous les arts : il faut en connaître les bases et les règles pour pouvoir les briser 🙂 Du coup, une connaissance de la littérature est un gros plus pour réussir il me semble.
Après, que signifie « haut niveau de connaissances en littérature » ? Le problème, c’est qu’on hiérarchise souvent la littérature : il y a la littérature générale en haut et les littératures de genre (romance, fantasy, fantastique…) en bas.

Reply
Ingrid 16 février 2019 - 17 h 23 min

Très bon article qui fait du bien à lire! Étant débutante, le Nano m’a fait beaucoup de bien et j’ai enfin pu achever un premier jet de 100k mots grâce à ce genre de technique d’écriture. J’avais aussi beaucoup aimé le livre Écrire et se faire publier de Bob Mayer qui parlait de « colle à popotin » : en gros il n’y a pas de recette miracle pour écrire, si ce n’est s’asseoir et écrire écrire écrire:) c’est en forgeant qu’on devient forgeron!

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Marièke 23 février 2019 - 16 h 02 min

Bob Mayer ? Je ne connais pas cet auteur ! Je vais regarder ça ! Merci pour la référence 😉

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Ingrid 24 février 2019 - 14 h 20 min

C’est un auteur américain de livres d’espionnage ou d’aventure, il me semble.. mais c’est surtout Ecrire et se faire publier que j’ai trouvé plein de pistes et de bon sens 🙂

Reply
Pauline 16 février 2019 - 17 h 30 min

Merci pour ce bel article ! Je suis intégralement d’accord avec toi. Je nuance un peu en pensant aussi que ce qu’on appelle « talent » est finalement différent selon les goûts des personnes confrontées au texte. Il suffit de lire un bestseller qu’on trouve personnellement NUL pour remettre en question une idée de « talent » universel.

Reply
Marièke 23 février 2019 - 16 h 03 min

Je suis assez d’accord avec toi. Disons qu’une personne capable d’écrire un bestseller a au moins le talent d’avoir su sentir et s’inscrire dans une tendance 🙂 Mais oui, tous les lecteurs ne lisent pas pour les mêmes raisons et il est impossible de plaire à tout le monde !

Reply
Celine 16 février 2019 - 22 h 06 min

Merci pour cet article. C est top.

Reply
CELINE 17 février 2019 - 1 h 08 min

Article extrêmement intéressant. Merci Marieke !
Je suis assez d’accord avec ton point de vue. Je trouve qu’en France, la vision de l’écrivain est trop élitiste. Au point que je ne peux pas dire à tout le monde que j’écris, par pudeur, mais aussi pour ne pas qu’on m’accuse de me prendre pour une élite.

Je pense qu’il faut aussi une combinaison de « talent » et de « travail » pour arriver à écrire un roman. Quoi que, comme tu le dis, le travail peut parfois suffire pour terminer un livre… mais sans talent, ce livre peut être « nul ».
D’un autre côté, même si tous les sportifs font leur maximum, tout le monde ne peut pas devenir Usian Bolt, Federer ou Messi… Il y a une part de talent innée à ne pas négliger.

Après, comme le fait remarquer le commentaire de PAULINE… Tous les goûts sont dans la nature. J’ai personnellement moi même détesté des livres encensés par la majorité ou au contraire, adoré des livres tués par la critique. Alors ? Quels sont les auteurs qui ont au final du « talent » ? Je pense que tout ce qui est artistique est subjectif…

Reply
Marièke 23 février 2019 - 16 h 07 min

Très d’accord avec toi. Disons que le talent rajoute ce petit quelque chose en plus !
Après, tu peux détester un livre en tant que lectrice car il ne correspond pas à ce que tu aimes lire pour te divertir / te former / te sensibiliser (les raisons de lire sont diverses). MAIS tu peux tout de même reconnaître qu’il y a un talent dans le style / l’histoire…
Enfin, je pense que le monde de la critique littéraire mériterait un article à lui tout seul tant les mécanismes de sélection sont divers et pas toujours équitables. J’aimerais trouver un·e éditeur·trice pour m’en parler, mais c’est forcément un sujet compliqué à aborder.

Reply
Emilie Deseliène 17 février 2019 - 11 h 50 min

Complètement d’accord avec cette alliance talent / travail pour écrire un (à peu près bon) roman. La vision française est tellement étroite, élitiste (et pas que du point de vue de l’écriture d’ailleurs, c’est une philosophie générale, qui s’applique à bien des domaines…Comme la notion d’échec et de succès, par exemple!). Mais ça fait du bien de voir de plus en plus d’auteurs qui s’opposent à cette vision, qui défendent l’apprentissage, les ateliers d’écriture, les blogs d’auteurs, etc : autant de pratiques qui tendent à montrer que l’écriture est à portée de tous, pour peu qu’on le souhaite vraiment et qu’on s’y mette sérieusement !

Reply
Marièke 23 février 2019 - 16 h 07 min

Contente de voir que mon avis est partagé ! 🙂

Reply
Ferdinand Trotignon 17 février 2019 - 22 h 28 min

Personnellement, je ne crois pas au talent, je pense que ça n’existe pas. Il n’y a que le travail et des personnalités qui s’expriment.
Tu as parfaitement raison d’opposer ces deux visions « l’écrivain-artiste-maudit » et « l’écrivain-technicien ». Et d’autant plus d’accord pour dire que les français ont des décennies de retard en la matière. Je me bats contre cette vision des choses tous les jours en tant qu’éditeur.
En revanche, je ne pense pas qu’il exsite une part de talent pour autant. Parce que ça suppose effectivement qu’il existe une caste de gens qui, dotés par la nature pour une raison x ou y, sont meilleurs que les autres pour raconter des histoires. Une sorte d’élite élue des dieux, et ça, pour moi, c’est une vision dangereuse qui revient à rejoindre le discours français qui nous plombent…
Non, il n’y a pas de talent. Les gens qui ont du talent,étrangement, ce sont tous intéressé à la littérature, à la poésie ou au storytelling depuis leur plus tendre enfance… étrangement. Tous les grands auteurs ont même, statistiquement, tendance à venir des mêmes milieux sociaux… étrangement.
Pour moi, ça veut dire ce que ça veut dire. Le « talent », ça se forge socialement aussi. Le talent, c’est simplement des gens qui ont des facilités à écrire des histoires parce qu’ils ont pris le pas de le faire très jeune, parce qu’ils ont été éduqués comme ça, parce qu’ils ont reçu un bagage socio-culturel efficace en la matière. Bref, aucun miracle là dedans. On ne nait pas naturellement avec la capacité de raconter des histoires, on apprend simplement à le faire, consciemment ou inconsciemment.

Et à partir de là, il ne faut pas non plus tout confondre. La technique américaine, quand on la décortique, n’a jamais eu la prétention de donner toutes les clés pour écrire de A à Z. C’est une technique, une science, rien de plus. Elle donne des outils pour écrire de meilleure histoires, pas les construire à partir du néant.
Allons plus loin, c’est une science, et elle est largement incomplète. L’humanité tout entière ne connait pas, actuellement, toutes les clés qui font une bonne histoire. On cherche encore et on a pas fini.
Pire encore, les américains ont tendance à déployer un discours maladroit qui voudrait que toutes les bonnes histoires suivent tel schéma. Dans la réalité, eux-mêmes ne l’utilisent pas dans tous leurs chef d’oeuvre. Il n’existe pas qu’une seule recette, il y en a des tas, on ne les connait pas toutes.
Encore une fois, ce ne sont que des outils. On ne visse pas une vis avec un marteau. Et bien en écriture, c’est pareil. Il faut savoir utiliser le bon outil au bon moment. Et ça aussi, ça s’apprend. Mais utiliser tous les outils d’un coup, c’est pas efficace.

Ce qui m’amène aux deux questions qu’il reste : le travail et la personnalité.
Vous pouvez avoir toutes les facilité, tout le « talent » du monde, vous pouvez connaître la technique sur le bout des doigts, vous n’arriverez à rien si vous ne bûchez pas comme un malade pour écrire et surtout réécrire autant de fois que nécessaire. Ecrire, pour moi, c’est plus une affaire de volonté qu’autre chose. Est-ce qu’on a ou pas la volonté d’aller jusqu’au bout d’un projet ? La plupart des gens n’ont pas cette force en eux et abandonnent longtemps,très longtemps avant d’apercevoir la ligne d’arrivée.
J’ajoute d’ailleurs qu’il faut une sacré auto-discipline pour écrire, s’y mettre suffisamment souvent, suffisamment efficacement. Et la discipline, la technique, ça se travaille, ça se forge, ça s’apprend… comme le « talent ».
Et pour apprendre tout ça, il faut là encore la volonté d’aller jusqu’au bout des efforts nécessaires et tout le monde ne l’a pas.
Bref, conclusion : pour écrire, il faut avant tout et surtout une volonté de fer, une volonté à toute épreuve.

Et puis, il y a cette idée que tu évoque comme quoi on peut écrire une histoire plate, ou comme quoi il y a des goûts et des couleurs. Mes profs à moi disent aussi, dans leur discours très français, qu’il faut raconter à partir de choses qu’on a vécues pour que ça soit plus fort et plus vrai : on ne peut parler que de ce qu’on connait, c’est bien connu (mouais).
Et pour moi, c’est là qu’entre en jeu le dernier facteur de qualité d’un texte : la personnalité de son auteur. Le fameux petit truc en plus qui fait que Zola n’est pas Proust et inversement. Pas le talent, pas la technique, pas le travail : la personnalité de l’auteur.
Parce que vous êtes vous, parce que vous avez vécu telles choses dans votre vie, vous allez choisir de raconter des choses que les autres n’auraient pas forcément eu envie de raconter, vous allez même les raconter d’une manière qui vous est propre.
Et voilà, c’est tout. C’est ça qui fait que chaque texte est réellement unique, réellement original. Et donc, pour que vous racontiez une histoire qui touche les autres, vous avez besoin qu’elle vous touche personnellement.
Pour moi, un texte sans âme, sans couleur, c’est un texte sans personnalité. C’est l’auteur qui écrit comme un robot, parce qu’on le lui demande, ou parce qu’il pense que c’est ce qu’on attend de lui. Ça peut fonctionner s’il a la technique et qu’il travaille suffisamment. Mais ça sonnera creux parce qu’il ne saura pas lui-même ce qu’il y a de touchant et de profond dans son récit.
Donc même quand on est « de commande », il est essentiel d’être touché par l’histoire, ou que le chef de projet le soit.
Bref, chacun a sa personnalité et donc chacun va écrire des textes qui lui sont propres…

Et donc, puisque tout le monde a une personnalité, puisque tout le monde peut vouloir écrire avec suffisamment d’ardeur, parce qu’on peut forger son esprit à raconter des histoires, parce qu’on peut acquérir la discipline et la technique nécessaire pour écrire des textes… n’importe qui peut effectivement écrire un texte génial. Il suffit de le vouloir.
Ça prend un temps fou, ça demande des efforts presque surhumains, mais il suffit de le vouloir.

Et à partir de là, certains pourront avoir des facilités, de l’avance sur les autres, mais rien qu’une bonne dose de travail ne puisse remplacer.
Je l’ai vu se produire plus d’une fois.

Reply
Marièke 23 février 2019 - 16 h 13 min

Merci pour ton retour et tes réflexions !
Pas totalement d’accord sur l’idée qu’il faut avoir vécu quelque chose pour l’écrire : après tout, ceux qui écrivent de la fantasy n’ont pas forcément combattu de dragon dans leur vie 😉 Mais oui, certains types de personnalisés sont avantagés : l’empathie et l’écoute sont deux qualités humaines qui me semblent assez essentielles pour être capable de se glisser dans la peau et les émotions d’un personnage 🙂

Reply
Jérôme 18 février 2019 - 12 h 41 min

Pour ma part, j’ai toujours considéré que le talent représentait un 1% de l’alchimie d’un livre (ou d’une chanson, ou d’une peinture, etc.) et que les 99% qui restent sont du travail et de la sueur.
Dans une interview célèbre, Jacques Brel allait jusqu’à dire que le talent inné n’existe pas. Que les seules choses réelles pour créer une oeuvre, c’est le travail et l’envie de créer cette œuvre. C’est cette envie qui donne l’inspiration et la motivation pour aller jusqu’au bout. Je suis d’accord avec lui.
Personnellement, l’élitisme artistique m’a toujours posé problème, c’est pourquoi je m’inscris également dans une démarche qui rend l’écriture accessible à tous. Mon blog personnel a également cette ambition.Je suis ravi de voir que d’autres partagent ce point de vue. Nous ne seront jamais trop nombreux à le promouvoir 🙂
Merci Marieke pour cet article.

Reply
Marièke 23 février 2019 - 16 h 15 min

Le blogging est une forme d’expression démocratique après tout 😉

Reply
PaulineB 19 février 2019 - 9 h 26 min

Très intéressant ton article sur l’écriture d’un livre, je découvre ton blog et j’aime beaucoup ! Le talent facilite, mais le travail est primordial !

Reply
Marièke 23 février 2019 - 16 h 16 min

Merci ! Et bienvenue sur le blog 🙂

Reply
Jinhy 21 février 2019 - 13 h 06 min

Bonjour, c’est la première fois que je laisse un commentaire même si je suis ton blog depuis quelques mois. J’ai déjà été confronté à cette pression du talent notamment par les différents professeurs de français que j’ai eu (j’écris depuis l’adolescence, j’ai aujourd’hui presque 30ans). Ça m’avait beaucoup découragé car ils étaient sévères et disaient que je n’avais aucun talent. Ce qui est très paradoxale car aujourd’hui j’ai participé et participe encore à des ateliers d’écriture où j’entends parfois que j’ai beaucoup de talent. Et c’est là que viens la question qui me pousse à écrire ce commentaire : à force de travail pour affiner son talent même faible, ne devient-on pas talentueux jusqu’à parfois devenir un génie ?

Reply
Marièke 23 février 2019 - 16 h 20 min

C’est en écrivant que l’on devient écrivain. Sans parler de talent ou de génialitude, plus tu écris, plus tu apprends à déjouer les pièges du texte que tu es en train d’écrire. Du coup, je ne sais pas si le travail peut permettre de développer le talent mais clairement, il permet de créer des automatismes et de faciliter l’acte d’écriture. Les sportifs le savent : il faut s’entraîner des dizaines d’heures pour être capable de sortir le bon chrono / le bon coup / le bon match au bon moment 😉

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