Cette semaine, j’ai choisi de vous parler des différents genres littéraires et de leur spécificité. L’une des spécificités de la fantasy est quelque chose qui m’a posé pas mal de problèmes au moment de travailler sur le texte Dragons d’illusion : l’existence de la magie. Retrouvez en fin de cet article une fiche de travail à imprimer ou à remplir en ligne pour travailler sur la magie dans votre récit de fantasy.
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>> EDIT 20/10/2015 : As this post was very well received in French, some people told me to create the index card in English. You can find it at the end of this post.
>> Un roman peut faire partie du genre Fantasy sans pour autant comprendre magie : d’autres éléments peuvent être « magiques ». Retrouvez cet article sur Fantastique / Fantasy pour voir les différences entre ces deux genres. Vous verrez que la magie n’y a pas totalement sa place.
Je pense qu’il est essentiel, au moment où l’on commence à travailler sur un roman de fantasy, de s’interroger sur la forme de magie que l’on veut utiliser. Il ne faut surtout pas penser qu’elle est unique. Que c’est comme dans tous les romans. D’un roman de fantasy à l’autre, la magie a des origines, des pratiquants, des formes et des buts très divers.
Les caractéristiques de la magie
Des origines différentes
Tous les auteurs n’expliquent pas vraiment d’où est issue la magie et ses mécanismes, cependant, selon le monde que vous avez créé, vous pouvez avoir une raison logique à l’existence de magie (une source magique dans le sol, la présence d’une météorite sur le sol, un temple qui produit de la magie…). Il y a des dizaine de raisons différentes qui peuvent justifier l’existence de la magie dans votre monde. A vous de voir si vous avez envie d’en parler ou non (dans Harry Potter, JK Rowling n’en parle pas. Dans Games of Throne, JR Martin lie la magie aux dragons mais ce n’est pas bien évident, alors que dans Eragon, le dragonnier est détenteur de la magie de son dragon.
Souvent, elles ont deux origines distinctes :
- Naturelle : la magie vient du monde extérieur.
- Interne : la magie est issue du corps du magicien.
Faire cohabiter plusieurs magies
Il est tout à fait possible d’avoir plusieurs magies en présence dans un même monde.
- Dans la plupart des jeux de rôle de Square Enix, il y a la magie noire, la magie blanche et la magie verte. Et elles ne viennent pas forcément de la même source.
- Dans Tolkien, la magie des nains est différentes de celle des magiciens.
- Dans Dragons d’illusions, j’ai imaginé deux magies différentes qui s’annulent. Je vous en dirai plus.
Les croyances des contemporains
Selon les origines que vous choisissez, vous devez aussi définir si les contemporains sont au courant de l’existence de la magie. Certains écrits de Fantasy placent leur histoire dans un monde parallèle au nôtre (Les chroniques de Narnia, A la croisée des mondes). D’autres, choisissent de placer un monde magique dans notre monde. C’est le cas de Harry Potter où les moldus ne connaissent pas l’existence de la magie, mais aussi de Game of Thrones : les contemporains des magiciens ne croient pas vraiment à la magie (et aux dragons). D’autres auteurs, encore, placent leur histoire dans un monde où la magie est connue. C’est le cas de JR Tolkien.
Des formes différentes
La magie peut épouser des formes très différentes d’une histoire à l’autre.
- La magie élémentaire : la magie prend la forme des éléments. C’est le cas dans la plupart des jeux de Square Enix (Final Fantasy, Dragon Quest…)
- La magie issue des potions, de poudres : la magie naît de potions. Dans Harry Potter, le professeur Rogue est un spécialiste de cet art.
- La magie défensive : la magie forme des boucliers qui permettent de se défendre d’attaques physiques et/ou magiques.
- La magie issue de sortilèges : la magie se forme grâce aux sortilèges prononcés par les sorciers.
Des pratiquants
Les pratiquants de la magie ont des formes et des statuts très différents selon les récits.
- Héréditaire : l’enfant d’un magicien sera un magicien. C’est son corps, son sang qui produiront la magie.
- Cultuelle : le pratiquant d’un culte sera doté de pouvoir à son entrée dans le culte ou après plusieurs années de pratique. Dans Games of Throne, les priants rouges sont dotés de pouvoirs.
- Savoir : il faut connaître des sorts, des incantations pour s’approprier la magie.
- Naturelle : la magie est présente de partout et toute personne peut s’en servir, selon son expérience. C’est le cas dans Star Wars, pour peu qu’on identifie la Force à une forme de magie.
- Objet : la magie est contenue dans certains objets, dans certains êtres.
- Entité : la magie décide par elle-même qui elle va doter de ses pouvoirs.
Enfin, il est totalement possible que plusieurs de ces aspects se recoupent. Dans Harry Potter, les sorciers sont sorciers de façon héréditaire, la plupart du temps, mais il faut du savoir pour l’utiliser et la baguette magique permet de la canaliser. Dans Eragon, le dragon est porteur de magie. Ce dernier la transmet au dragonnier qui y fait appel en appelant les objets par leur nom elfique.
Selon les mondes, les magiciens sont plus ou moins bien vus. Dans Le Seigneur des Anneaux, les sorciers sont bien vus — du moins quand ils ne sont pas fous… — alors qu’ils sont pris pour des êtres maléfiques et dangereux dans Games of Throne.
Les problématiques
L’existence de magie pose différentes questions au moment de rédiger votre histoire. J’en ai rassemblé ici quelques unes mais n’hésitez pas à ajouter dans les commentaires les questionnements qui sont nés au moment de réfléchir à votre magie.
Magie noire / magie blanche
Un débat intéressant au moment de travailler sur la magie peut être la question du but même de la magie : y-a-t’il une magie noire naturellement mauvaise ou son porteur est-il le seul à en faire une magie maléfique ? Par exemple dans Harry Potter, il existe des sorts interdits et des arts issus de la Magie noire. Dans Le Seigneur des Anneaux, l’art nécromancien est de la magie noire.
L’évolution
Il est important aussi de définir ce qui fait un bon magicien : son expérience, le nombre de sorts qu’il peut réaliser, la quantité d’énergie magique qu’il a en lui, la force de l’objet qu’il a en sa possession ? Plus encore, si l’un de vos personnages est magicien, vous devez vous interroger sur son évolution au cours de l’histoire : sait-il tout dès le début ? Va-t-il apprendre de nouveaux sorts ? Va-t-il renforcer son potentiel magique ? Et enfin, quelles sont les limites à la magie ?
- Les jeux vidéos sont très intéressants pour étudier cette problématique, de même que les jeux de rôle.
- Dans Le Seigneur des Anneaux, lorsque Gandalf est confronté à la mort, il change de couleur (de gris à blanc). Cela lui donne de nouvelles capacités.
- Dans Harry Potter, l’apprentissage des sorts est très bien détaillée (rien de très étonnant vu qu’on est dans une école de sorciers…). J’ai juste un petit regret, c’est le manque d’explications concernant la force d’un sorcier. On a l’impression que le sort Expelliarmus (sort qui permet de désarmer son adversaire) est suffisant pour mettre à mal un Avada Kedavra (sort qui permet de donner la mort en un coup) s’il est lancé par le bon sorcier… Lors de la lecture, ça ne m’avait pas vraiment gêné mais en y repensant, je me dis que c’est assez surprenant que le premier sort tout basique suffise à contrer le sort le plus puissant de la magie noire… Et comment fait-on pour savoir qui est le sorcier de plus grande valeur ?
- Dans Eragon, le dragonnier peut potentiellement tout faire puisqu’il lui suffit d’appeler les choses par leur nom elfique. Il peut potentiellement mettre le feu en disant Brisingr et rendre la vie à un quelqu’un en disant Lif. Cependant, chacun de ces sorts a ses limites : Brisingr fait perdre connaissance au dragonnier quand il est invoqué avec trop de puissance et Lif est inefficace tant que le dragonnier n’est pas assez fort. C’est à ce dernier de connaître ses limites et sa puissance avant de faire appel à un sort.
Comment se défendre de la magie ?
Vous allez certainement vous poser cette question si vous créez des magiciens combattants. L’utilisateur de la magie et le non-utilisateur de la magie peuvent-ils parer une attaque magique ? Comment font-ils ? Y-a-t’il des sorts, des antidotes ou des boucliers qui permettent de se protéger ? Y-a-t’il un niveau à avoir pour pouvoir parer une attaque ou tout le monde peut s’en sortir ?
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Au final, je crois qu’il faut réfléchir dès le début de son histoire à la magie qui sera en présence dans votre monde de Fantasy. C’est essentiel pour la cohérence de l’histoire : pourquoi ce personnage peut-il faire ça et pas son voisin d’à côté ? Ceci dit, vous pouvez tout à fait décider de passer certains aspects sous silence : JK Rowling n’explique pas d’où vient la magie dans son monde ou pourquoi certains enfants de Moldus développent de la magie.
Pour vous en sortir, je vous conseille d’établir une fiche de concept. C’est comme une fiche personnage ou une fiche lieux mais pour un concept particulier de votre monde (les religions, l’art guerrier, une créature fantastique, une science particulière… Ou encore la magie). J’en ai fais une pour Dragons d’illusion alors que je commençais juste la rédaction pour ne pas me perdre dans mes différentes idées. Voici une fiche à partir de cet article. Vous pouvez l’enregistrer au format JPEG (image) en cliquant dessus et en l’enregistrant ou la télécharger au format PDF modifiable à la page Documents (réservée aux abonnés à la newsletter : il y en a une de prévue ce samedi, je vous remets le lien si vous ne l’avez pas).
English version 🙂
A vendredi pour un article sur les sciences et les technologies dans la SF.
Marièke
Crédit image : Marcher sur l’eau… Voilà un pouvoir qui peut servir 🙂 (Pixabay, CC0)
12 comments
Bonjour,
Justement je posterai mercredi une nouvelle Fantasy et en lisant votre article je me dis que je ne me suis pas trop mal débrouillée (enfin je crois…). Ce serais intéressant pour moi que vous me disiez ce que vous en pensez.
Bonne journée.:)
Avec plaisir ! 🙂 J’imagine que ce que j’écris est avant tout du sens commun : je ne fais que résumer les différents livres que j’ai lu et que je connais.
Merci pour cet article vraiment complet !
Je pense qu’une autre source très intéressante, c’est la magie pratiquée dans le monde réel. Que l’on y croit ou non, des livres et des pratiques existent et il y a autant de façon de faire de la magie qu’il y a de cultures. Ce n’est pas si compliqué que cela de se renseigner en surface et l’imagination de peuples est souvent impressionnante et enrichissante, bien plus que ce que nous autres auteurs pouvons bien concevoir dans notre bulle. Bien sûr, pas question de faire des boules de feu dans la magie ancrée dans le réel: on est plutôt dans du rituel et de la prière. Certains exemples paranormaux peuvent aussi être intéressants (et troublants, du coup…).
C’est à moitié ce que j’ai fait dans mon premier roman: d’un côté une magie simplette et funky, à base de boules de feu. Soit, c’est facile mais ça fait plaisir. Mais de l’autre côté, je me concentre sur des magies plus « réalistes » ou en tout cas qui ont déjà été pratiquées dans le monde réel. Je te mets le lien du billet où j’en parle, si ça t’intéresse (je m’y suis concentrée sur la magie égyptienne) : http://dorianlake.blogspot.com/2015/07/la-magie-dans-mon-roman.html
Oui, c’est vrai que j’en parle peu dans cet article mais la fiche peut s’y adapter. Les pratiques ésotériques, la chasse aux sorcières, l’exorcisme et j’en passe… Tout cela entraîne des ouvrages et pose des questions quant à l’existence de la magie dans notre monde ! 😉
[…] Inventer un monde magique […]
Petit détail qui ne sert à rien, mais il faut remarquer que si un monde où des contemporains existent (quelqu’en soit le moment dans l’histoire de l’humanité) accueille de la magie où un monde sous-jacent, voire parallèle qui possède des lois magiques, ça ne s’appelle pas de la fantasy, mais du fantastique 🙂
Le fantastique, c’est le surnaturel à partir de notre monde.
La fantasy, c’est le surnaturel à partir d’un monde imaginaire.
Bien à vous
Mugigi :
Pas exactement. La fantasy peut se passer dans notre monde réel, du moment que les personnages et le lecteur ne doutent pas de l’existence de la magie dans ce monde. Harry Potter est un roman fantasy qui se passe dans notre monde mais où la magie est considérée par les sorciers comme naturelle/évidente.
Dans un roman fantastique, l’histoire prend aussi place dans notre monde mais des événements troublants/anormaux vont venir altérer la réalité en apparence et les personnages ne savent pas si ces événements se produisent réellement ou si c’est eux qui virent fous ou bien s’ils rêvent. C’est le cas d’Alice au Pays des Merveilles, où à la fin Alice ignore si elle est vraiment allée au Pays des Merveilles ou si elle a rêvé. Le poème Nevermore d’Edgar Allan Poe est aussi un bon exemple : à la fin du poème, ni le poète ni le lecteur ne savent si le corbeau a parlé ou si tout ça n’est qu’un rêve ou bien si le poète est devenu fou…
Bref, la fantasy c’est donc la certitude de la magie, des événements étranges et des créatures légendaires, quand le fantastique c’est le doute, l’hésitation quant à la magie et aux événements vécus par les personnages. 😉
Je plussoie cette définition 🙂
[…] de Fiche Personnages (principal ou secondaire) Modèle de Fiche de Concept (écrire la […]
Bonjour, merci pour cet article assez complet, un bon résumé de ce qu’on peut trouver dans les livres ^^
Juste un petit détail vis à vis de l’exemple de Harry Potter : en fait, expelliarmus ne permet pas de contrer l’avada kedavra. C’est arrivé deux fois mais ce n’est pas le sort en lui même qui a protégé Harry : la première fois dans le cimetière c’est parce que sa baguette et la Baguette de Voldemort sont jumelles (elles contiennent chacune une plume du même phénix) qu’elles ne peuvent pas s’affronter entre elles et donc, partant, leurs propriétaires non plus ! Et à la fin du livre, c’est tout simplement parce que la baguette de sureau appartient désormais à Harry qu’elle « refuse » de le tuer et qu’un simple expelliarmus lui permet de la récupérer et de renvoyer vers Voldemort son propre sortilège. S’il avait utilisé le sort expelliarmus dans n’importe quelles autres circonstances, il n’aurait eu aucune chance face à un avada kedavra, peut importe la puissance personnelle du lanceur ?. J’espère que c’est clair, je le dis juste pour l’info, pour une fois que je peux étaler ma science ?
Bonne continuation !
J’ai bien aimé cet article. Cette fiche concept me servira de base pour les magies, même si je devrais les développer après.
Toutefois, j’ai du mal à comprendre ce qu’est la magie liquide. Est-ce l’idée d’en créer ou juste de le contrôler ?
Bonjour et merci pour ton message !
Cela peut-être l’un ou l’autre ou les deux 🙂 C’est complètement à toi de déterminer les limites de ta magie !