Si vous êtes coutumier de la lecture des conseils d’écriture, vous n’êtes peut-être pas sans savoir que le débat Prologue / pas Prologue est récurrent dans cette sphère. En effet, vous trouverez de nombreux conseils en écriture qui vous diront de ne pas mettre de prologue « car les éditeurs n’aiment pas ça. »
Aujourd’hui, dans le cadre du Challenge Voulez-vous écrire un roman avec moi ? je souhaitais écrire cet article pour m’insurger en faux contre cette affirmation puisque… certains ouvrages comportant des prologues sont encore publiés aujourd’hui. Tous les éditeurs ne sont donc pas contre cette pratique car certains auteurs savent utiliser les prologue avec intérêt.
>> Cet article appartient au chalenge Voulez-vous écrire un roman avec moi ? et à ma méthode d’écriture pas à pas.
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Qu’est-ce qu’un prologue ?
Définition du prologue
Le prologue (du grec προ (pro) : avant, et λóγος (logos) : discours) est la première partie d’une œuvre littéraire ou la première scène d’une œuvre dramatique, faisant office de préface, d’introduction ou de préambule, et servant à situer les personnages et l’action de l’œuvre en exposant divers points essentiels à connaître pour l’intelligence de la pièce.
(Cf Wikipédia – oui, je récupère mes définitions sur Wikipédia… Je ne sais pas si les professeurs de français détestent encore cette encyclopédie…)
On notera par ailleurs que le prologue est d’abord associé au théâtre et que la fiction littéraire l’a ensuite repris à son compte.
Ce qu’il faut retenir
Le prologue est une partie dissociée du reste du texte :
- Il peut avoir une narration, un interlocuteur ou encore un point de vue différent du reste du roman qui le sépare complètement du reste du roman
- Il sert à apporter une connaissance au lecteur en amont de la lecture du livre en lui donnant un éclairage différent sur un personnage, un lieu.
Pourquoi limiter l’usage du prologue
Si le prologue est aussi critiqué aujourd’hui, c’est pour trois raisons que j’ai pu récupérer de mon expérience de lectrice et/ou sur des blogs :
Le prologue n’est pas une excuse pour faire un truc chiant
Je ne suis pas une amatrice de high-fantasy (j’aime la fantasy, mais quand ça devient trop trop trop poussé et qu’on y perd le plaisir de suivre les personnages, je n’adhère plus…). Aussi, je garde un épouvantable souvenir du prologue du Seigneur des Anneaux. Dans ce dernier, JRR Tolkien revient sur la création de son univers, sur les raisons pour lesquelles l’anneau existe et sur la façon dont l’anneau a fini par arriver dans les mains de Bilbon (en gros, c’est la somme de deux autres de ses romans – Le Silmarillon et Biblon le Hobbit – résumés en une trentaine de pages). La plupart des lecteurs du Seigneur des anneaux me répondront qu’il ne fallait pas lire ce prologue et le sauter… mais pourquoi écrire un truc s’il faut le sauter ? Pourquoi ne pas plutôt mettre ce texte en fin de roman, en annexes ?
Bref, ne partez pas du principe que vous devez tout mettre dans votre prologue et que si le lecteur s’ennuie, il sautera : l’éditeur ne fera pas forcément cette démarche quand il ouvrira votre livre et le lecteur non plus. Ils risquent simplement de lâcher votre livre pour de bon. Et vous n’êtes (peut-être) pas JRR Tolkien : il était novateur dans sa démarche à l’époque et il avait vraiment construit tout un monde autour de son roman.
Le prologue peut être un nid de clichés
Prenez une prophétie. Ajoutez-y une pincée d’Elu et de magie. Saupoudrez avec un grand méchant qui ne pourra mourir qu’en échange du sacrifice et vous avez… Harry Potter. Non, je déconne. Vous avez un prologue empli de clichés (j’adore Harry Potter mais reconnaissez que JK Rowling ne s’est pas trop foulée sur le coup de la prophétie…)
Le risque de mettre un prologue est 1) de mettre un prologue parce que tous les auteurs le font (notamment les auteurs de Fantasy à cause du prologue du Seigneur des anneaux…) et 2) d’utiliser des louches et des louches de clichés et d’incantations qui « font bien »… mais qui n’apportent pas grand chose à l’histoire.
Le prologue ne devrait pas spoiler la fin de votre roman
Dernier gros défaut du Prologue est qu’il peut spoiler l’ensemble de votre roman. Genre si vous écrivez un roman policier et que vous vous mettez dans la tête du tueur / de la victime le temps de l’assassinat, avant d’aller suivre le policier qui mène l’enquête… Cela peut être une source de suspens, si c’est bien fait. Mais cela peut aussi tout faire tomber à l’eau.
De même, certains auteurs trouvent intéressant de prendre un morceau de leur avant-dernier chapitre, de le mettre au début et d’écrire : « Quelques semaines plus tôt » pour lancer leur chapitre 1. Là encore, l’effet peut être intéressant. Cela permet notamment de plonger votre lecteur directement dans l’action… mais si c’est pour lui refourguer ensuite trois chapitres ennuyeux et lui voler tout effet de surprise à la fin… ce n’est peut-être pas le meilleur choix que vous ayez fait.
Alors, prologue ou pas prologue ?
Comme à chaque fois que j’écris ce type d’article, je ne vais pas vous dire si, oui ou non, vous devez inclure un prologue ou non. Je ne le peux pas. Je pense que vous connaissez mieux que moi votre histoire et les raisons qui vous ont poussé à inclure un prologue à votre texte.
Si vous avez écrit un prologue pour l’une des raisons suivantes, je vous enjoins à vérifier qu’il soit vraiment bénéfique pour votre texte :
- C’est bien de faire un prologue, parce que c’est à la mode (NOOOON)
- Faire un prologue m’a permis de mettre de l’action rapidement dans mon texte (oui, mais non : si votre prologue bouge bien mais que les 4-5 chapitres suivants ne bougent pas du tout, votre lecteur risque d’être un peu déçu)
- J’ai pu raconter toute la fondation de mon monde dans mon prologue (Aïe. Pourquoi ne pas mettre cette explication à la toute fin de votre roman ?)
Bonus : Des astuces pour gérer le prologue
Vous souhaitez intégrer un prologue dans votre récit car cela vous semble cohérent mais vous craignez de vous faire mal voir par l’éditeur. D’ailleurs, c’est même pour ça que vous êtes ici maintenant : vous ne savez pas quoi faire de votre prologue : le garder ou le supprimer ?
Transformer votre prologue en chapitre 1
Si vous tenez absolument à garder votre prologue au début de votre roman, pourquoi ne pas tout simplement faire de votre prologue votre chapitre 1 ? Il peut tout à fait y avoir une différence de locuteur, de temporalité ou encore de point de vue entre les chapitres. Si vous jugez votre Prologue bon et vraiment utile à votre lecteur tout en vous disant que le prologue peut freiner un potentiel éditeur… allez-y ! Au pire, si votre roman est pris, vous pourrez toujours proposer à votre éditeur de retransformer votre chapitre 1 en prologue 🙂
(Ce conseil peut vous paraître tordu, mais je peux comprendre ceux qui veulent mettre toutes les chances de leur côté pour l’édition et qui s’interrogent en ce sens sur ce que pensent les éditeurs.)
Eclater votre prologue et l’utiliser dans votre roman
Un des conseils que j’avais entendu pour réaliser un roman qui bouge consiste à écrire tout son roman puis à éclater ses trois premiers chapitres et à les replacer dans le texte car ces trois premiers chapitres n’étaient souvent que de l’exposition inintéressante. Je ne suis pas aussi catégorique mais je trouve que l’idée a son charme et dans le cas du prologue, il n’est pas du tout impossible que vous puissiez répartir les informations qu’il contient tout au long de votre texte sans pour autant l’alourdir de trop.
Dernier point
Juste au cas où. Sachez que si votre texte est très bon, l’éditeur devrait savoir passer au-delà de sa haine contre le prologue pour lire votre texte et l’accepter 😉
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Il est impossible de vous dire avec certitude, alors même que je ne connais pas vos romans et vos prologues, si vous devez écrire un prologue pour votre texte. Il est possible que votre texte mérite un prologue, il est possible que votre texte mérite un prologue mais pas celui que vous avez écrit, il est possible que votre texte se suffise amplement à lui-même.
Pour trancher, n’hésitez pas à demander l’avis à vos bêta-lecteurs. Demandez-leur si :
- Votre prologue leur a apporté quelque chose
- Votre prologue leur a donné envie de lire la suite
- Votre prologue a gêné leur lecture…
- Votre prologue est nécessaire (il est possible que, bien que vous soyez attaché à ce prologue, il soit entièrement inutile à l’histoire…)
Je vous souhaite plein de courage pour la suite de votre texte.
Avez-vous décidé d’écrire un prologue ? (Moi oui…)
Marièke
Crédit image : Un auteur bien torturé par ses réflexions par Tim Gouw (Unsplash, CC0)