Il y a près d’un mois, je proposais aux abonnés de la newsletter un coup de gueule concernant l’orthographe. Son but : arrêter de faire de l’écriture un média réservé à une élite qui écrit sans faire de faute. Ce texte a reçu une bonne réception et j’ai eu envie de prolonger le débat 🙂 N’hésitez pas à y répondre et à partager votre avis (même si vous faites des fautes !)
>> En postant ce texte, mon intention n’est ni de me dédouaner par rapport aux fautes d’orthographe que je fais régulièrement sur ce blog, ni de prôner le langage SMS. Il s’agit avant tout de montrer qu’internet entraîne une nouvelle utilisation de l’écrit.
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Le web renforce la visibilité des fautes
Comme l’imprimerie et l’ouverture de la lecture ont changé le français en leur temps, le web transforme notre langue en permettant à tous de s’exprimer sans filtre. L’écrit s’expose brut, spontané et constellé de fautes d’orthographe sur les réseaux sociaux et les blogs, là où il se cachait auparavant dans la correspondance privée. Le seul écrit visible publiquement était alors l’écrit officiel, corrigé, lu et relu avant de s’apparaître dans les livres, les journaux et les textes officiels.
Face à cette montée de la visibilité des fautes d’orthographe, certains s’offusquent et craignent pour leur langue et son intégrité : le langage SMS est le Mal, les fautes d’orthographe sont le fait d’imbéciles qui sont complètement illettrés rendus abrutis par leurs écrans de télévision.
Cette réaction est disproportionnée mais entraîne une forte auto-censure. Bon nombre de personnes se limitent dans leur écriture parce qu’elles font des fautes. Elles ont tellement peur de la mauvaise image qu’elles pourraient avoir qu’elles préfèrent s’autocensurer, se taire. Et ce, alors qu’elles ont certainement des choses pas plus bêtes que les autres à dire.
L’omniprésence des fautes d’orthographe
La science de l’orthographe est une science barbare et quelques fautes, par-ci, par là, ne sont pas forcément le signe de la débilité profonde de celui qui les commet. Elles peuvent être dues à un manque d’attention, de connaissances, d’habitudes, d’intérêt, aussi. Ou encore à la dyslexie et ou à la dysorthographie, troubles qui rendent difficile la mémorisation de l’orthographe des mots, bien qu’on les ait lus et écrits des milliers de fois.
Au final, la plupart des francophones font des fautes d’orthographe, ne serait-ce que parce que notre langue est compliquée à maîtriser de bout en bout (pensez à la fameuse dictée Pivot : que celui qui l’a finie sans aucune faute me jette la première pierre virtuelle !). En donnant la possibilité à tous de publier, le web ne fait qu’afficher notre perfectibilité.
Le droit de s’exprimer à l’écrit
Faut-il forcer pour autant les francophones au silence digital pour ne plus écorcher la langue française ? Faut-il fermer l’accès internet de tous ceux qui font plus de trois fautes ? Faut-il automatiquement refuser le manuscrit d’un auteur parce qu’il commet une faute par page ? Faut-il renvoyer dans leur chambre tous ces délinquants de l’orthographe pour qu’ils y étudient le Bescherelle ? Faut-il couper les mains de tous ces assassins de la langue de Molière pour qu’ils cessent d’écrire ?
Je ne le crois pas. Je ne le crois pas, en partie parce que je commets des fautes moi-même, mais aussi parce que je pense que les idées ne devraient pas être muselées pour un « é » devenu « er » ou un « s » manquant. Pour le bien du français, de la littérature et des idées, ne faisons pas de l’écriture un média élitiste. Tout le monde a le droit de s’exprimer, d’être lu et d’être écouté, qu’il fasse des fautes ou non. Le web permet cette ouverture et je la trouve salvatrice pour notre démocratie.
Osez, pensez, écrivez. Malgré les fautes d’orthographe.
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N’hésitez pas à réagir sur cet article. Cela fait longtemps que je m’interroge sur ces questions. J’aime la langue française et ses complications (elles me le rendent bien) et en même temps, je ne peux pas accepter que celui qui ne la maîtrise pas doive se taire ou attendre qu’on le corrige pour avoir le droit de s’exprimer. Quelqu’un a-t-il une idée de compromis ? 🙂
Très bon weekend à vous et à lundi pour un article tout particulier…
Marièke
Crédit image : Une main sur un clavier. (Pixabay, CC0)