Évide est un roman que j’ai terminé il y a très longtemps de ça, alors que je n’avais pas 18 ans. En découle un roman un peu lourd que j’aimerais retravailler…
Il y a maintenant près de 10 ans, je terminais le premier jet de Évidence, mon premier roman. J’avais alors 17 ans et je m’apprêtais à commencer ma Terminale. Je détestais me relire et Évidence est quelque part dans un tiroir (enfin, c’est une façon de parler : dans un fichier de mon ordinateur), vierge de toute réécriture. Je ne l’ai jamais vraiment terminé et pourtant j’ai tiré de cette expérience de nombreuses leçons que j’utilise encore pour écrire.
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1. Un roman terminé ne l’est pas
Je l’ai appris à mes dépends. Un premier jet n’est en aucun cas la version finale d’un roman. Un premier jet est bazardeux, il a des personnages parfois instables, des intrigues pas toujours cohérentes. Il a des fautes d’orthographes et de syntaxe. C’est pourquoi j’ai un peu peur de remettre le nez dans Évidence : je sais que le travail de réécriture sera conséquent. Je le ferai certainement. Un jour.
2. Le premier jet n’est pas définitif
Et donc, ça ne sert à rien de faire tout un plat du premier jet. En vrai, il est tellement bancal qu’il a le seul mérite d’exister et de servir de squelette à la suite du travail. Cela ne sert à rien de peaufiner un premier chapitre 15 fois avant d’écrire le deuxième chapitre : vous vous rendrez peut-être compte, au chapitre 14, que vous avez oublié un personnage important… Puis au chapitre 22 que votre personnage n’a pas les cheveux blonds comme vous le pensiez, mais roux. Alors mieux vaut noter tout ça quelque part et continuer. Quitte à faire un premier jet imparfait puisque de toute façon, il ne sera pas définitif.
3. Ecrire, c’est de la persévérance plus que du talent
J’ai aussi appris qu’écrire est d’abord une question de persévérance, de ténacité. Une belle histoire jamais terminée, qu’est-ce, sinon une belle histoire jamais terminée ? Elle finira sa vie dans un fichier informatique où, c’est vrai, elle ne prendra pas la poussière, mais où elle ne sera jamais lue. Ecrire, c’est avant tout se botter les fesses pour se pousser à avancer, même si l’histoire est un peu bancale et que vous vous en rendez compte. L’inspiration d’une intrigue, le talent de la belle tournure de phrase ne suffisent pas à faire un roman. S’asseoir chaque jour devant son bureau pour écrire, par contre… Et même si vous ne trouvez pas la bonne tournure lors du premier brouillon pas de problème : vous pourriez trouver l’idée qui tue lors de la deuxième, de la troisième ou de la énième version.
4. Écrire un roman est possible…
Finir ce premier jet pour la première fois a été un souffle de confiance en moi énorme. Jusqu’ici, je me lançais dans des projets compliqués dont je ne parvenais jamais à voir la fin. Je m’arrêtais au premier chapitre, au cinquième quand je me forçais. Et j’en étais arrivée à me demander si je ne serais jamais capable de réussir à écrire et si mon envie d’être écrivaine (je l’ai depuis mes 7 ans) était réaliste. Conclure ce premier jet m’a prouvé que j’en étais capable. Quand je me lance dans un projet aujourd’hui, je suis beaucoup plus convaincue de ma capacité à éviter les pièges et à réussir grâce à cette expérience. D’ailleurs, j’ai conclu tous les projets entamés depuis. (Enfin, j’ai conclu les premiers jets ^^)
5. …à condition d’avoir un plan
Ce qui a fait que j’ai réussi cette fois là est que j’avais un plan. C’était un drôle de plan puisque c’était une histoire courte (pas vraiment une nouvelle, plutôt un conte écrit quand j’étais en cinquième). Un jour, j’ai décidé de réécrire cette histoire et elle est devenue un roman sans que je ne le décide vraiment. Le conte initial était donc une sorte de synopsis géant qui m’a bien aidé… Je l’ai compris bien plus tard mais l’existence de ce plan m’a permis de finir là où mes petites idées sur lesquelles je me basais auparavant pour écrire un roman n’étaient pas suffisantes. Pour le roman suivant, L’Encre de Paix, j’ai fait un plan. Cela a fonctionné.
6. Ecrire s’apprend — et on apprend en écrivant
Que vous écriviez de la fiction ou de la non-fiction (un mémoire, une thèse, des articles pour votre blog), vous apprenez. J’ai appris en finissant ce premier roman que je travaillais mieux avec un plan solide. Et depuis, je continue d’apprendre à chaque fois que je travaille sur un autre projet de fiction ou de non-fiction. J’ai découvert il y a peu que je suis plus inspirée le soir mais beaucoup plus productive le matin…
7. Finir un roman n’apporte pas la gloire
Je n’ai pas envoyé mon premier jet aux maisons d’édition, je n’ai pas été publiée, je n’ai pas été courir les salons, je n’ai pas signé d’autographe. Matériellement, avoir conclu ce premier jet ne m’a rien apporté. Et c’est aussi un apprentissage. L’écriture est avant tout un voyage personnel et il faut en profiter car il pourrait rester personnel 🙂
8. Savoir reconnaître les imposteurs
Les « écrivains » qui vous expliquent qu’ils ne retravaillent jamais leur premier jet et que toute l’histoire devrait couler de source du premier coup sont soit 1) des menteurs ou 2) des imposteurs ou 3) les deux. Tous les auteurs que j’ai rencontrés jusqu’à maintenant (et je commence à en connaître un petit paquet) disent la même chose – le premier jet est un bazar sans nom. Avancez à votre vitesse sans complexes et n’écoutez pas ceux qui vous disent qu’écrire est une histoire de muse, de talent et d’inspiration : ils n’ont jamais écrit plus d’un chapitre… La muse, le talent et l’inspiration existent et peuvent allumer l’étincelle de votre roman… mais c’est le bois coupé à la sueur de votre front qui le fera arriver à terme.
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Au final, et c’est réellement ce que cette première aventure m’a appris, il ne faut pas se faire tout une histoire du premier jet. C’est un moment important pour votre histoire, certes, car c’est la première fois qu’elle prend réellement forme sur le papier, mais c’est tout. Rien ne vous empêche de le modifier presque entièrement si la structure, telle que vous la faites lors du premier jet, ne vous satisfait pas. Le premier jet est seulement un brouillon à bonifier.
Avez-vous déjà terminé le premier jet d’un roman ? Qu’avez-vous appris à travers cette expérience ? Avez-vous du mal à finir vos romans depuis ou est-ce que, comme moi, cela vous a débloqué ?
A vendredi pour un article un peu différent de ce que je fais d’habitude, spécial Noël 🙂
Marièke
Crédit image : La première première version de Evidence a été écrite de façon manuscrite (Pixabay, CC0) — l’histoire faisait alors 40 pages grands carreaux recto-verso. J’ai commencé la réécriture lorsque j’ai reçu un ordinateur portable, quelques temps après. Le roman fait désormais plus de 100 pages A4 sur Word en Times New Roman taille 12 🙂