Gérer la critique pour devenir un meilleur auteur

by Marièke

Au moment de  travailler sur la bêta-lecture, je me suis rendue compte qu’il existait de nombreux articles sur la bêta lecture et ses bénéfices pour les auteurs. Parce que je ne pense pas pouvoir apporter grand chose sur le sujet, je me suis dit que j’allais faire porter mon article en amont de la soumission de son texte à un bêta-lecteur : comme le titre de cet article l’indique, il portera sur la gestion de la critique. Comment accepter de montrer son texte à l’autre après des mois de travail ? Comment gérer les retours, positifs et négatifs des bêta-lecteurs puis des lecteurs ?

Quelques ressources sur la bêta-lecture, si vous ne connaissez pas ce système :

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L’importance de gérer la critique pour un auteur

À titre personnel, j’ai eu ma première expérience de la critique il y a 5 ans, lors d’un stage en tant que journaliste. J’étais censée écrire pour un journal et j’avoue avoir mal vécu la relecture / réécriture / correction de la secrétaire de rédaction. Jusqu’ici, mon écriture n’avait jamais été remise en doute. On (le lycée et les enseignants) m’avait toujours dit que j’écrivais bien, que mon style était bon et tout, et tout. Bref, j’étais sûre de moi. Un peu trop sûre de moi.

La critique, qui a pris pour moi la forme d’une réécriture du titre, d’une phrase, puis d’un paragraphe a fait mal. J’ai détesté que l’on retouche mon texte sans même m’en parler – la secrétaire de rédaction ayant des obligations de rendu, elle ne m’a pas consulté et j’ai découvert les changements une fois l’article publié. Il y a eu plusieurs autres articles retouchés et, à chaque fois, j’ai eu mal au coeur de voir les articles que j’avais mis tant de temps à rédiger être lacérés… Jusqu’à ce que je réalise que le résultat n’en était que meilleur. C’était plus clair, plus compréhensible…. C’était mieux, quoi.

Avec le temps, j’ai mieux accepté la critique jusqu’à ce qu’elle me paraisse nécessaire. Il me semble que la critique est une étape nécessaire vers 1) la publication (faire lire) et 2) la publication. Imaginez : vous ne supportez pas que l’on vous fasse la moindre critique sur ce que vous écrivez mais vous voulez être lu par des millions de personne… Il y a comme un hic, non ? 🙂

C’est pourquoi j’avais envie de parler de la bêta-lecture, d’ailleurs. C’est le premier contact avec l’autre, le premier moment où le lecteur s’exprime vis à vis de votre texte. Il me semble que cela peut être un filtre avant de révéler votre texte au grand jour.

Parce que j’ai personnellement mal vécu la critique, je pense avoir ma petite pierre à apporter à l’édifice du « comment gérer la critique ? » aujourd’hui. Donc si vous êtes tendu à l’idée que l’on lise et que l’on critique vos textes (vos bébés), voici quelques conseils pour mieux gérer la critique.

Gérer les critiques

Se préparer aux critiques

À la manière du boxer qui bombe le torse au moment où son adversaire le frappe, il est possible de se préparer (un peu) aux critiques afin d’en amortir l’impact.

Pour cela, commencez par faire votre introspection. Apprenez à vous connaître. Si vous savez ce qui vous fait mal en général (notamment la critique contre vos capacités), vous y serez ensuite moins sensible. Cela vous permettra de prendre plus de recul et d’être moins émotif.

Prendre un bêta-lecteur a un intérêt dans ce cadre. Si vous copiez-collez votre texte directement de votre bloc-note à une plateforme de lecture telle que WattPad, vous l’exposez sans aucun filtre. Vous risquez vraiment d’avoir mal. Non parce que WattPad, et internet en général, sont des repaires de grands méchants commentateurs, mais parce que vous allez avoir plusieurs retours en même temps. Vous risquez d’être vite débordé et vous sentir agressé. Le (ou les) bêta-lecteur(s) vous permettront d’avoir un premier avis de lecteur sur votre texte et de vous aider à parer les critiques : soit en vous permettant de modifier votre texte, soit en vous préparant aux critiques que vous pourriez entendre ensuite.

Trier les critiques

Une fois votre texte publié (envoyé à un bêta-lecteur, posté sur un forum ou encore envoyé à un éditeur), des critiques vont arriver. Vous allez devoir les trier : c’est le secret de la tolérance aux critiques. Il faut savoir les classer selon leur pertinence. Il y a les critiques méchantes et inutiles, les critiques négatives constructives et les critiques positives. Elles doivent toutes être lues mais pesées en fonction de leur intérêt. Une critique positive de votre meilleur ami n’a pas le même poids que celle d’un lecteur habitué aux comités de lecture.

En gros :

  • Appréciez les critiques positives mais sachez que votre talent d’écrivain ne grandit pas en en entendant 🙂
  • Entendez les critiques négatives qui vous paraissent constructives (manque de cohérence dans l’intrigue, un personnage qui est bizarre, votre style qui n’est pas toujours compréhensible…).
  • Ignorez les critiques méchantes et insultantes qui, même si elles ont un fond, vous feront du mal.

Comprendre les critiques

Si une même critique revient à plusieurs reprises mais que vous ne parvenez pas à la comprendre, n’hésitez pas à poser des questions plus spécifiques pour mieux comprendre ce qu’on vous reproche. Ce ne sera pas forcément agréable mais il faut souffrir pour faire un bon texte 😉

Répondre aux critiques

D’une manière générale, j’ai tendance à penser, à part les messages insultants, tout commentaire, mail ou retours nécessitent une réponse. Les gens qui ont pris le temps de vous faire un retour méritent une réponse. C’est d’ailleurs la règle que je me suis donnée pour ce blog ^^ On est d’accord que si vous vous appelez JK Rowling et que vous recevez deux cent cinquante mille commentaires chaque jour, ce n’est pas applicable ! Mais dans le cadre d’un partage de votre texte sur un forum ou à quelques bêta-lecteurs, c’est totalement possible 😉

Répondre aux critiques ne veut pas pour autant dire que vous devez intégrer dans votre texte tous les retours. Vous pouvez en accepter certaines et en refuser d’autres. C’est l’intérêt de répondre, il me semble : vous pouvez dire que vous avez entendu la remarque mais que vous avez choisi de ne pas l’intégrer car (insérer la raison ici). D’une part, cela vous permet de vous poser la question (pourquoi, au fait, je n’intègre pas cet élément ?) et d’autre part, la personne n’a pas l’impression d’avoir perdu son temps.

Utiliser un questionnaire pour mieux tolérer la critique

Voici un dernier truc que j’aime bien pour apprendre à tolérer la critique 😉

Au lieu d’envoyer votre texte seul à votre bêta-lecteur, accompagnez-le d’un petit questionnaire. Cela vous permettra de générer des critiques intéressantes et pertinentes (et ce, d’autant plus si votre bêta-lecteur n’est pas un habitué des retours) et de vous protéger.

Voici une liste des questions que vous pouvez poser. Je l’avais utilisée pour interroger mes bêta-lecteurs sur le texte Pouvoirs (il s’agissait de ma meilleure amie et de ma mère… pas forcément un très bon choix car la première avait peur de me blesser et la seconde était avant tout intéressée par les fautes d’orthographe… mais je les remercie pour leur aide ^^)

A. Ouverture

  • Les premiers paragraphes et la première page étaient-ils intéressants ? Est-ce qu’ils t’ont donné envie d’aller plus loin dans ta lecture ? Sinon, quel était le problème ?
  • Est-ce que tu as compris assez rapidement à travers le texte le personnage principal de l’histoire, ce qu’il se passe, quand et où ? Sinon, qu’est-ce qui t’a perdu au départ ?
  • Est-ce que l’histoire a continué à t’intéresser au cours des premiers chapitres ? Sinon, à quel moment as-tu senti ton intérêt fléchir ?

B. Personnages

  • As-tu pu t’identifier au personnage principal, ressentir ses émotions (ses joies, ses peurs, ses inquiétudes…) ?
  • A quel personnage t’es-tu le plus identifié ? Pourquoi ? Qu’as-tu aimé (ou détesté) chez lui ?
  • Selon toi, y’a-t-il des personnages qui pourraient rendus plus intéressants, plus sympathiques, attachants ?
  • L’antagoniste gagnerait-elle à devenir plus méchante, plus gentille, plus développée ?
  • As-tu été perdu entre les différents personnages ? Y’a-t-il trop de personnages à suivre ? Certains ont-ils trop le même caractère, les mêmes noms ?

C. Dialogues

  • Les dialogues t’ont-ils paru naturels ? Sinon, lesquels t’ont paru artificiels, intéressants ? Pourquoi ?
  • Comment penses-tu qu’ils pourraient être améliorés ?
  • Chaque personnage a-t-il une voix ?

D. Les scènes

  • As-tu été capable de visualiser où et quand l’histoire se déroulait ?
  • Est-ce que les scènes et leur découpage t’ont fait entrer dans l’histoire immédiatement ?
  • Est-ce que les descriptions t’ont paru assez détaillées, vivantes, réelles ? Manquent-elles d’infos ou au contraire, en recèlent-elles trop ?

E. Intrigue, les scènes, le déroulement

  • L’ histoire t’a-t-elle semblé intéressante ? T’as-t-elle emporté ou au contraire ennuyé ? Quels moments t’ont-ils paru trop longs ?
  • Quelles scènes, paragraphes, phrases as-tu préféré ?
  • Quelles scènes étaient excitantes ? Pourraient-elles être développées, encore améliorées ?
  • Quelles scènes étaient ennuyantes ? Penses-tu qu’elles devraient être réduites, remplacées, voire supprimées ?
  • Des scènes t’ont-elles paru bizarres, frustrantes ou ennuyantes ?

F. Style, ton, récit

  • Penses-tu que le style correspond à l’histoire et au genre ? Sinon, pourquoi ?
  • As-tu apprécié la narration employée ?

G. La fin

  • La fin était-elle satisfaisante ?
  • La fin était-elle logique, plausible ?

H. Orthographe

  • Pendant que tu lisais, as-tu repéré des répétitions grossières et choquantes ?

******

Voilà pour ce long article sur l’acceptation des critiques. Je pense vraiment qu’apprendre à les gérer peut aider à être un meilleur écrivain en ce sens que cela permet de s’ouvrir plus facilement.

Qu’en pensez-vous ?

A mardi pour un article sur la plateforme Welovewords et à vendredi pour le deuxième article de cette série : Comment devenir un meilleur bêta-lecteur ?

Marièke

Crédit image : Quelle note cette juge donnera-t-elle à votre texte ? Est-ce que cela vous inquiète ? (Pixabay, CC0)

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11 comments

Stéphane 8 janvier 2016 - 10 h 51 min

Amusant : mon prochain post sera justement dédié à mes béta-lecteurs. C’est le sujet du moment, il faut croire ! 🙂
Je suis bien d’accord avec ton article, et je recommande très vivement l’histoire du questionnaire : cela prend du temps mais multiplie considérablement l’intérêt de la béta-lecture (tout en forçant celui qui commente à argumenter ses critiques, ce qui les rend tout de suite plus constructives, et donc plus faciles à encaisser).
Bon, par contre, je ne suis pas fan de toutes tes questions (certaines sont trop des « questions d’auteurs », difficiles à renseigner pour un lecteur qui n’a pas lui-même de compétence d’écriture)… mais pour le coup, à chaque auteur sa sauce, et moi-même je n’utilise jamais le même questionnaire d’une fois sur l’autre, alors… 😉

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Marièke 8 janvier 2016 - 10 h 55 min

C’est le sujet de l’auteur qui arrive à la fin de son texte 😉
Je comprends pour les questions : ce sont des questions spécifiques à un texte, dans un cas ! Il faut les adapter à son texte et à ses bêta-lecteurs, c’est évident.

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Lynda 8 janvier 2016 - 12 h 07 min

Je suis pareil que Stéphane, je trouve que certaines questions seront difficiles pour des lecteurs qui ne sont pas eux-mêmes auteurs.
Sinon pour ajouter quelque chose, je trouve intéressant d’avoir 2 types de bêta-lecteurs :
– effectivement un bêta-lecteur du type « confrère » c’est à dire quelqu’un qui écrit aussi et qui aura une lecture, de fait, plus orientée sur l’écriture en elle-même
– mais aussi un bêta-lecteur du type « lecteur lambda » c’est à dire quelqu’un qui n’écrit pas, qui est juste lecteur et qui aura une lecture plus « classique »
Dans le 1er cas j’aurais tendance à proposer un questionnaire, dans le 2ème je laisse carte blanche, l’intérêt étant d’avoir son ressenti global et de savoir où il a décroché, par exemple, en discutant après avec lui.
Souvent on se rend compte que ce qui va choquer un lecteur-écrivain ne va absolument pas déranger un lecteur-lambda… parfois on a tendance à être trop perfectionniste !

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Marièke 8 janvier 2016 - 12 h 31 min

C’est vrai qu’en tant qu’auteur on voit des choses différentes du lecteur régulier.
Le seul risque de ne pas donner un questionnaire, c’est d’avoir un lecteur pas forcément sûr de ce qu’il doit dire… et du coup, qui n’ose pas dire.

Reply
Dorian lake 8 janvier 2016 - 20 h 06 min

Article très intéressant, merci !
Et si accepter la critique n’est pas toujours facile, c’est toutefois nécessaire. Après, elle s’accepte plus facilement quand les formes sont là. C’est que l’égo, il se laisse pas toujours faire !

pour les fiches, très bonne idée. Parfois le gens (non auteurs plutôt) ont du mal à me dire ce qu’ils pensent d’un texte de manière précise. Alors peut-être pas toutes, mais si tu le permets, je les garde de côté !

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Marièke 8 janvier 2016 - 22 h 13 min

Hé oui, l’égo a des réactions parfois surprenantes !

Pas de souci pour les fiches, c’est même fait pour ça ! Après, tu remarqueras via les autres commentaires que certaines questions sont peut-être un peu trop techniques et/ou trop tournées sur le bouquin pour lequel elles ont été créées : n’hésite pas à les adapter à ta situation et à tes bêta-lecteurs ! 🙂

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Sonia 8 janvier 2016 - 22 h 01 min

Ton article est très intéressant. Je demande toujours à mes beta lecteurs d’argumenter les critiques quelles soient positives ou négatives. Mais de temps en temps, j’avoue que je mets un certain temps à m’en remettre, surtout lorsque ces critiques proviennent de blogs littéraires. Mais cela fait avancer !

Et j’attends avec impatience mardi pour ton article sur « we love words ». J’ai un compte chez eux et mes nouvelles y sont publiées. Je me pose sérieusement la question à savoir si je cloture mon compte ou pas.
A très bientôt !
Sonia

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Marièke 8 janvier 2016 - 22 h 18 min

Merci 🙂 Et oui, les critiques ne sont pas toujours agréables, même bien formulées, même bien argumentées… On a passé tellement de temps sur notre bébé que c’est toujours un peu douloureux de se voir critiquer sur ce point !
Héhé, si tu utilises WeLoveWords, je ne sais pas si je vais t’apprendre des choses nouvelles, mais j’espère que l’article t’aidera à prendre une décision 🙂

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sonia 9 janvier 2016 - 10 h 31 min

J’y vais rarement sur We love words et l’utilise très peu. J’ai quelques extraits de mon roman et mes nouvelles et j’ai également fait quelques concours. Je ne sais pas ensuite à quoi ce site sert exactement. Tu nous diras ça !
Bon week end,
Sonia
ps : lorsque tu auras eu le temps de mettre en PDF la fiche personnage, tu pourras nous le dire. Merci merci 🙂

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Marièke 9 janvier 2016 - 11 h 08 min

Hélé 🙂 Pareil que toi concernant mon utilisation de WeLoveWords ^^
Bon weekend à toi aussi !
PS : Oui, je vais essayer de faire ça cette semaine 😉

Reply
Acroz 13 mars 2017 - 17 h 56 min

« Selon toi, y’a-t-il des personnages qui pourraient rendus plus intéressants, plus sympathiques, attachants ? »
qui pourraient ÊTRE rendus ?

Vraiment un super article et un questionnaire très très pertinent. J’adore ! Merci !

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