Animer ses descriptions

by Marièke

Il y a deux types d’auteurs. Ceux qui aiment les descriptions et ceux qui les détestent. Je croyais faire partie du second groupe jusqu’à ce que mon travail de réécriture sur Entre chiens et loups ne me poussent à aller plus loin et à comprendre leur utilité… et leur côté fun. Oui, elles ont en un. Et je vais même vous dire comment le faire ressortir 😉

*****

Jusqu’à il y a peu, j’avais tendance à envisager la description comme un passage obligatoire à la rédaction d’une scène. Juste parce que. Je faisais des descriptions car la plupart des auteurs en font et que cela semblait. Je n’y prenais aucun plaisir. Jusqu’à réaliser, en relisant le premier jet de mon projet de Entre chiens et loups, que :

  1. Mes descriptions étaient plates et banales
  2. L’atmosphère du roman en était altéré… Les descriptions fixent l’action dans l’espace. Les dialogues et les actions ne se suffisent pas. Du moins, pas dans mon roman.

Faible de cette constatation, j’ai donc décidé de réviser l’ensemble en m’amusant un peu plus. J’ai cherché des exemples de descriptions qui me parlaient et j’ai réalisé que je détestais les descriptions qui tiraient en longueur sans autre but que la précision. Celles de Balzac par exemple, auteur payé à la ligne, qui écrit des descriptions si détaillées que l’imagination n’a plus sa place. Ou celles de JRR Tolkien si nombreuses et si longues que l’on en perd le fil de l’action.

>> Assez logiquement, je n’aime ni la high fantasy ni les romans rattachés au mouvement du réalisme français (Maupassant, Flaubert, Zola, Balzac)… Je les trouve assez proches (les adorateurs de ces deux genres risquent de m’en vouloir mais tant pis) du fait qu’ils sont basés sur le foisonnement des détails. Le premier dans un monde fantastique, le second dans le monde réel.

A contrario, j’aime les descriptions qui n’en sont pas vraiment. J’aime les descriptions qui respirent, qui vivent, qui évoluent avec les personnages.

Quelques conseils pour des descriptions efficaces

A partir de ces constatations, je vais essayer de dresser une liste des éléments indispensables pour réussir ses descriptions. C’est plus ou moins la liste que j’ai mis en oeuvre au moment de réviser mon roman. Il s’agit là d’une liste tout à fait personnelle, faite par une fille qui n’a jamais pu finir Le Seigneur des Anneaux : adaptez-là à votre style, à votre genre, ou encore à ce que vous aimez.

  • On remplace Avoir et Être par d’autres verbes au sens plus fort ;
  • On fait attention à garder une cohérence entre ses descriptions et son point de vue : pourquoi le personnage qui vit dans sa chambre depuis 15 ans irait-il la décrire avec précision ?
  • On mise sur les 5 sens : trop souvent la vue est le seul sens qui est utilisé. Or comment décrire le métro parisien sans parler des sérénades des musiciens, de l’odeur d’urine qui flotte dans certains couloirs ou du grincement d’un métro à pleine vitesse ? L’odeur, le goût, le toucher et l’ouïe ne doivent pas être oubliés.
  • On alterne sa façon de décrire. Une description peut être faite du détail au global, du global au détail. Elle peut être placée en début de scène / de chapitre. Elle peut se découvrir en mouvement. Le personnage qui glisse dans une allée de graviers, qui pose dans un tintement sa tasse de café sur une table de verre.
  • On évite de multiplier ses descriptions, en longueur et en nombre, pour éviter l’overdose.
  • On tente les images différentes. « Les cheveux blonds comme les blés », « les yeux bleus comme des saphirs, brillants comme des diamants »… Ça a mille fois été écrit et ça sonne comme une mauvaise phrase d’approche. On essaye autre chose 😉 On peut même tenter l’humour et les jeux de mots si l’ambiance du roman s’y prête.
  • On varie le rythme de ses phrases. Courtes pour une ambiance festive. Longues pour un lieu plus solennel. Ou inversement si l’effet fonctionne.
  • Comme d’habitude, on teste, on essaye, on lit, on réécrit, on relit, on gomme, on recommence.
  • Et surtout, on ne les néglige pas ! Le lecteur n’est pas différent de nous. Si on s’ennuie en les lisant, il s’ennuiera aussi. On prend le temps de les travailler.

A vous

Quel est le rôle des descriptions pour vous ? Aimez-vous les écrire ? Les lire ? Comment les travaillez-vous ?

À lundi pour une petite surprise…

Crédit image : Sunset in Paris, par Vincent Anderlucci (CC BY, Flickr)

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7 comments

Dorian Lake 3 juillet 2015 - 17 h 22 min

Je n’aime pas les lourdes descriptions non plus et comme toi, celles de Tolkien m’horripilent.

A écrire, cependant, je prends parfois beaucoup de plaisir à faire des descriptions. J’en fais très peu et la plupart du temps elles sont courtes. Décrire la rue et citer les enseignes où compter les bières dans un bar n’a pour moi aucun intérêt. Si le lieu n’a pas de grande importance, rien ne sert de trop le décrire.

Par contre, par moment j’aime poser un beau, ou au contraire un horrible moment. Décrire un paysage splendide, escarpé et dramatique, aux couleurs miroitantes, oui. De préférence avec des métaphores, presque en poésie. Il ne faut pas que ce soit ennuyeux, mais ça peut donner au lecteur une grande inspiration. Au contraire, un crime horrible ou de l’horreur peut également être décrite avec minutie, pour peu que ça fasse rentrer le lecteur dans le récit et surtout pas l’en sortir.

Sinon tes conseils sont top, c’est ce qu’il faut faire je pense. Merci!

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Marièke 4 juillet 2015 - 21 h 08 min

Oui, je suis d’accord avec toi sur le fait qu’il ne faut pas s’appesantir sur les éléments qui n’ont pas d’importance et ne font pas avancer l’intrigue. Il faut juste savoir doser de façon à ne pas laisser flotter le lecteur dans un environnement complètement noir.

Contente que les conseils t’inspirent 😉

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Sizel 9 juillet 2015 - 13 h 32 min

Comme toi, je déteste les longues descriptions bien qu’ils m’arrivent d’en apprécier à de rares occasions.

En écrire est un exercice que je maîtrise peu. Trop ou pas assez, j’ai du mal à trouver l’équilibre ! Je peine également à les intégrer de façon naturelle dans le flux du chapitre, tant ce n’est pas ma priorité dans mes histoires, même si je sais que c’est incontournable et d’autant plus en SFFF.

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Marièke 9 juillet 2015 - 19 h 40 min

J’ai plus ou moins les mêmes difficultés que toi. J’omets un peu de les faire, surtout quand j’utilise le point de vue interne. C’est un peu plus facile avec le point de vue omniscient. J’imagine que c’est une question d’expérience pour parvenir à les caser de façon naturelle dans un texte.

Et oui, c’est clair qu’en SF ou en fantasy, les descriptions sont d’autant plus importantes que tu inventes des lieux 😉

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Elly 9 décembre 2017 - 22 h 16 min

Donc quel monde Zola est un auteur réaliste alors que tous ses romans sont considérés comme naturalistes ? Peu importe.

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Marièke 17 décembre 2017 - 12 h 47 min

Je ne parlais pas de courant littéraire, plus de façon de raconter un récit. Oui, les romans de Zola s’inscrivent dans le courant du naturalisme mais il dépeint de façon réaliste le contexte qu’il décrit 😉

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Ingrid 5 novembre 2018 - 9 h 33 min

D’accord pour Tolkien et Balzac, pas d’accord pour Zola, qui est mon modèle de descriptions vivantes et animées !

« Il força son compagnon à admirer le jour se levant sur les légumes. C’était une mer. Elle s’étendait de la pointe Saint- Eustache à la rue des Halles, entre les deux groupes de pavillons. Et, aux deux bouts, dans les deux carrefours, le flot grandissait encore, les légumes submergeaient les pavés. Le jour se levait lentement, d’un gris très doux, lavant toutes choses d’une teinte claire d’aquarelle. Ces
tas moutonnants comme des flots pressés, ce fleuve de verdure qui semblait couler dans l’encaissement de la chaussée, pareil à la débâcle des pluies d’automne, prenaient des ombres délicates et perlées, des violets attendris, des roses teintés de lait, des verts noyés dans des jaunes, toutes les pâleurs qui font du ciel une soie changeante au lever du soleil ; et, à mesure que l’incendie du matin montait en jets de flammes au fond de la rue Rambuteau, les légumes s’éveillaient davantage, sortaient du grand bleuissement traînant à terre. » (Le Ventre de Paris)

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