Les 12 étapes de la fabrication d’une BD

by Marièke

Bonjour,

Après quelques tergiversations, je suis allée au salon Livre Paris lundi 19 mars dernier. L’occasion de rencontrer quelques éditeurs et éditrices de ma connaissance et de suivre une des conférences que j’avais repérées : les coulisses de la BD, les étapes de la fabrication d’une BD. Ne connaissant qu’assez peu le milieu de l’édition de BD, j’ai été très intéressée par les discours de Flavie Soucy, éditrice aux éditions de La gouttière, et de Dawid, dessinateur de BD.

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Avant de commencer

Tout comme pour les romans, il existe depuis quelques années plusieurs routes qui mènent à la parution d’une BD (via l’auto-édition par le crowdfunding notamment). Dans cet article, je n’évoquerai pas ces routes et parlerais plutôt de publication classique par l’intermédiaire des maisons d’édition spécialisées BD. Si la thématique de l’autoédition de BD vous intéresse, n’hésitez pas à m’en faire part dans les commentaires, j’essayerai de vous dénicher un témoignage !

Étape 1 : La rencontre

Une BD, le plus souvent, ce sont deux personnes : un·e dessinateur·rice et un·e scénariste. Ces personnes ont des compétences bien différentes et un but : raconter une (ou plusieurs) histoires communes. Nous les appellerons les parents de la BD 🙂

« Une BD, c’est d’abord une rencontre. C’est le partage d’un projet, une histoire. »

Parfois, le·a dessinateur·rice peut être contacté·e par un·e scénariste qui aura déjà travaillé sur un texte. Si l’histoire lui plaît, le·a dessinateur·rice peut décider de participer au projet et la collaboration peut naître ainsi. Dans ce cas, les deux artistes sont parents à part entière de la BD : chacun doit accepter les idées et les partages de l’autre et le·a scénariste ne peut être seul·e maître à bord (je le précise car dans mon groupe Facebook Auteurs / Illustrateurs travaillons ensemble, nous faisons la chasse aux propositions de collaboration qui tournent à l’avantage des écrivain·e·s qui recherchent des illustrateur·rice·s pour illustrer gratuitement leurs oeuvres…)

Étape 2 : Une idée

Comme tout projet créatif, à l’origine d’une BD, il y a une idée. L’inspiration peut venir de n’importe où. D’un film, d’une personne rencontrée, d’une musique, d’une oeuvre…

Vous l’aurez compris : les étapes 1 et 2 peuvent être dans cet ordre (le couple a une idée) ou dans l’autre : l’un des membres du couple a une idée et rallie l’autre à son projet.

Étape 3 : La création du dossier

Contrairement au roman, qu’il convient de présenter entier à l’éditeur, la BD n’est pas soumise dans sa globalité à la maison d’édition à laquelle elle est destinée. En effet, il s’agit de remettre un dossier composé de :

  • Un résumé de l’histoire : un résumé de quelques lignes qui donne envie, comme une quatrième de couverture
  • Le synopsis : un résumé de l’histoire complète
  • Une partie du scénario ou le scénario dans sa globalité : une BD s’écrit comme un scénario de cinéma. C’est ce document qui doit être remis à la maison d’édition, en partie ou dans sa globalité, selon son avancement.
  • Un découpage : le découpage est une sorte de story board à l’état de brouillon de la BD. Il permet de visualiser le rythme de la BD et la façon dont l’histoire va être racontée. Il peut être soumis en partie ou dans sa globalité.
  • Quelques planches complétées : afin que la maison d’édition puisse avoir un bon aperçu de la BD finale, plusieurs planches complétées doivent être remise à la maison d’édition.
  • Des artworks : les artworks sont des oeuvres d’art. Ce sont elles qui permettent de visualiser l’atmosphère d’une BD (les lieux, le design des personnages…)

Ce dossier est essentiel. C’est lui qui va permettre à l’éditeur de vous choisir. Il ne faut pas le négliger.

Étape 4 : La sélection et la signature

C’est le moment pour la maison d’édition d’entrer en jeu. Les membres de la maison d’édition ainsi qu’un comité de lecture composé du public visé par la maison d’édition consultent les dossiers reçus et prennent des notes. La mise en commun de ces dernières détermine les projets choisis. À titre d’exemple, aux éditions jeunesse de La Gouttière, 4 BD étaient publiées chaque année à la création de la maison d’édition, 16 aujourd’hui.

Lorsqu’un projet est choisi, il est signé et une date de parution est décidée. C’est le top départ.

Étape 5 : le découpage

Les parents de la BD imaginent de concert le découpage en planches et en bulles du texte. C’est ce qui va permettre de raconter l’histoire et de la rythmer. C’est l’équivalent du storyboard au cinéma. D’ailleurs le découpage peut être annoté en dessous de chaque bulle à l’aide du scénario. Le découpage peut comporter des schémas ou être exclusivement composé de textes.

Étape 6 : les aller-retours et la validation

Les parents de la BD soumettent leur travail à leur maison d’édition. Commence alors la mise en commun et les aller-retours. Ils valident ensemble planche par planche. Le travail est fastidieux mais c’est lui qui est à l’origine de la BD.

Étape 7: le crayonné

Une fois le découpage terminé et validé, le dessinateur passe au crayonné. C’est une étape intermédiaire vers le dessin final. Il s’agit de tracer l’ensemble des traits.

« De nombreux dessinateurs travaillent directement sur tablette, explique Dawid. Pour ma part, je suis encore sur papier à cette étape. J’utilise un crayon bleu (que l’on peut trouver en papeterie spécialisée). Son avantage ? Il se gomme parfaitement, sans laisser aucune trace – à la différence du crayon à papier. »

Étape 8 : nouveaux aller-retours

De nouvelles validations suivent le crayonné. C’est la dernière étape qui accepte encore les modifications – il sera ensuite difficile d’en faire.

« On peut par exemple demander à déplacer un peu un personnage pour donner plus de profondeur à un dessin et le rendre plus lisible, » explique Flavie Soucy.

Étape 9 : l’encrage, la couleur et les ombrages

Une fois le crayonné validé, c’est le moment d’appliquer l’encre, la couleur et les ombrages. Selon la façon de travailler de l’artiste, sa rapidité et les délais qu’il·elle a à tenir, ce processus peut prendre plus ou moins de temps.

« Je repasse tout mes traits au feutre noir et applique les gris à l’aquarelle pour préparer mes ombrages avant le passage sur l’écran. Ensuite, je scanne l’ensemble de mes planches et j’applique la couleur sur ma tablette graphique. Ce processus me prend un jour par page. C’est souvent un temps imposé pour être dans les délais de parution. »

Étape 10 : l’impression

En parallèle de l’écriture et du dessin de la BD, la maison d’édition amorce les réflexions quant à l’objet BD. Entendez là l’image choisie pour la couverture, le pelliculage, le grammage, la rédaction de la quatrième de couverture, la mise en page de la couverture, la couleur de la garde (pages internes avant le début des pages imprimées)…

Une fois plusieurs planches réalisées, des essais sont ensuite envoyés à l’impression pour faire les réglages colorimétriques. Du choix de ces derniers dépend le rendu de la BD finale.

Étape 11 : la diffusion

Dans l’édition de BD, comme dans celle des romans, ils existent des entreprises peu connues du grand public : les diffuseurs. Leur travail : représenter les maisons d’édition auprès des librairies et autres organismes pour vendre la diffusion du livre / de la BD.

La maison d’édition rencontre son diffuseur attitré lors d’une réunion où elle lui fait part de ses prochaines sorties et remet ce que l’on appelle un argumentaire (argu, pour les intimes). Dans ce document d’une page, le résumé, des éléments sur les deux parents de la BD ainsi que des arguments de vente. Le diffuseur prend connaissance de la BD et ses représentant·e·s vont ensuite aller la vendre aux différentes librairies de France et de Navarre.

On peut aussi noter à cette étape l’existence des Services presses, ces livres qui sont envoyés aux journalistes et aux blogueur·se·s pour préparer la sortie des livres. La maison d’édition les distribue en général avant la date de parution officielle pour permettre à ces lecteur·rices·s de la première heure d’écrire des revues pour cette fameuse date.

Étape 12 : la distribution

L’imprimerie produit les BD et les remet au distributeur. C’est le dernier acteur de la chaine. Comme son nom l’indique si bien, c’est lui qui prend en charge la distribution des livres aux différentes librairies qui ont passé commande auprès du diffuseur.

Et voilà, la BD est en librairie !

Notez que les trois dernières étapes (impression, diffusion, distribution) sont les mêmes pour l’édition classique de romans. 

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Connaissiez-vous les rouages de la fabrication d’une BD ? Pour ma part, pas du tout (du moins, pas la partie conception, soumission et rédaction) et j’ai été très surprise par ce fonctionnement.

Belle journée et à demain pour une nouvelle newsletter !

Crédit image : Les étapes de la fabrication d’une BD par Joanna Kosinski (Unsplash, CC0)

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9 comments

MATHIEU LEGRAND 30 mars 2018 - 12 h 46 min

Merci Marieke pour ce dossier très instructif.
J’ai été particulièrement intéressé par le paragraphe sur les diffuseurs.
Vous y faites l’analogie avec les romans, et me demandais si des diffuseurs travaillaient en free-lance pour le compte d’auteurs éditeurs.

Bon WE Pascal

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Marièke 9 juin 2018 - 17 h 20 min

Merci 🙂 A ma connaissance, non les diffuseurs sont de grosses, grosses machines et il faut souvent payer très cher pour se faire une place auprès d’eux (les chiffres que j’ai tournent autour de 20 000 euros à engager pour les deux premières années comme gage d’investissement de la maison d’édition). Ceci étant dit, l’édition évolue et vous pouvez tenter de vous rapprocher d’autres auteurs auto-édités pour tenter de négocier à plusieurs.

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Brigitte 3 avril 2018 - 12 h 07 min

Merci pour vos conseils précieux ! j’ai une question sur le crayon bleu, y a t’il une marque ou un produit spécifique à demandé lorsque l’on veut en acheter un ? merci pour votre réponse

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Marièke 9 juin 2018 - 17 h 01 min

J’ai trouvé cet article sur le sujet : http://www.auxcouleursdalix.com/le-crayon-bleu-inactinique-un-bleu-qui-devient-invisible
Je pense qu’il répondra à vos questions 😉

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Oz 12 juillet 2019 - 11 h 06 min

Merci Marieke je vais ajouter un peu de connaissance sur mon mémoire de licence professionnelle

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Marièke 20 août 2019 - 8 h 32 min

De rien 😉

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Révolution 20 septembre 2020 - 6 h 56 min

n’importe quoi. Je demande pas l’avis à ses maisons d’édition à une idéologie mondialiste, marxiste.
C’est une véritable honte actuellement, prendre des dessinateur comme la maison dupuis ,glenat et tout ses pourris.

Mieux faire soi-même que mal accompagné.

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Marièke 30 décembre 2020 - 19 h 26 min

? Vous avez eu une mauvaise expérience avec une de ces maisons ?

Toutes les maisons n’ont pas les mêmes politiques 🙂

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