Donner une place aux femmes dans vos écrits : astuces et repères

by Marièke

La journée internationale des droits des femmes a eu lieu mercredi dernier et tout ce que j’ai pu lire m’a donné envie de réagir à ma façon.

Ayant reçu la question « Comment écrire un personnage de sexe féminin » dans mon questionnaire de janvier, j’avais envie d’y répondre avant de me dire que la question elle-même me posait problème. Pour moi, écrire un personnage de sexe féminin fonctionne exactement de la même manière qu’écrire un personnage de sexe masculin (j’y reviens dans cet article). La question me semble plutôt être comment donner aux femmes la place qu’elles méritent dans votre écrit.

PS : vous remarquerez que je ne parle pas de genre dans cet article parce que cette notion ne me parle pas vraiment.

*****

Pré-requis

Avant de vous donner mes quelques astuces concrètes pour égaliser votre façon de traiter vos personnages, j’avais envie de vous proposer ce test de Bechdel (ou de de Bechtel-Wallace) qui consiste à démontrer par l’absurde comment certaines oeuvres artistiques sont centrées sur les personnages de sexe masculin. En d’autres termes, c’est un test qui évalue en partie le degré de sexisme de votre roman 🙂

Une œuvre réussit le test si les trois affirmations suivantes sont vraies :

  • l’œuvre a deux femmes identifiables (elles portent un nom) ;
  • elles parlent ensemble ;
  • elles parlent d’autre chose que d’un personnage masculin.

Chaque affirmation vaut pour un point et une oeuvre réussit le test si elle obtient trois points.

Limites

Ce test permet d’évaluer le « taux de présence » des femmes dans les films en général. Il ne sert pas à prouver qu’un film est sexiste ou pas, mais à souligner qu’un grand nombre d’œuvres, et en particulier de films, n’ont pas suffisamment de personnages féminins identifiables qui permettent à l’histoire, ou au scénario, de passer un test aussi simple…

#1 Proposer des personnages de sexe féminins complexes

Je vais peut-être vous surprendre mais écrire un personnage du sexe féminin, c’est exactement comme écrire un personnage du sexe masculin. Un personnage du sexe féminin pense – parfois trop, parfois pas assez – il s’énerve – parfois trop vite, parfois pas du tout – il parle – parfois trop, parfois pour dire des banalités…

Je m’aventure sur un terrain glissant et je sais que certain(e)s n’adhéreront pas à cette analyse mais je me lance tout de même. Le fonctionnement des hommes et des femmes est similaire : ce sont les expériences personnelles (la famille, les proches, le vécu…) qui nous façonnent plus que notre sexe. D’après les scientifiques, il semblerait simplement que les plus jeunes enfants aient tendance à imiter plus naturellement le comportement du parent du même sexe qu’eux (notez que j’utilise le conditionnel car on s’écarte de ce modèle dans le cas des familles monoparentales ou homoparentales).

Bref, vos personnages adopteront des comportements liés à leurs expériences de vie et aux personnes avec lesquelles ils sont proches plutôt que lié à leur sexe. Il est cependant possible que les attentes de la société – le garçon virile, la fille féminine et douce – et les violences dont les femmes sont victimes plus régulièrement que les hommes – harcèlement, attouchements, viol – aient un impact sur leur développement et leur caractère en grandissant.

#2 Interroger les clichés verbaux et les personnages récurrents

Comme souvent, je ne peux que vous encourager à vous interroger sur les clichés qui sont sans cesse répétés. Demandez-vous pourquoi la l’intello qui reste timide au fond de la classe est toujours une fille ou pourquoi le cancre qui fait le clown est toujours un garçon. Et cet anti-héros pas beau ? Pourquoi finit-il toujours avec une fille intelligente et jolie ?

#3 Intégrer des femmes parmi vos personnages secondaires

Si le test de Bechdel-Wallace présenté au début de cet article n’est pas suffisant pour analyser le sexisme d’un texte, il est évident qu’un texte qui bannit les femmes de ses lignes pose problème (Sauf si on se trouve dans une société futuriste où les femmes ont disparu. Cela va sans dire.)

Mon conseil / astuce dans ce genre de cas revient à intégrer des femmes parmi vos personnages secondaires. Une femme peut être boulangère, chirurgienne ou éleveuse bovine. Il suffit de l’intégrer à votre histoire. Ce petit changement n’a l’air de rien (c’est parfois seulement une lettre qui change) mais cela contribue à ne pas faire disparaître les femmes de l’espace public.

*****

Ce petit article était assez différent de ce que j’ai l’habitude de vous proposer, j’espère qu’il aura pu vous interroger et vous aider à développer autrement vos personnages. Notez que si vous devez écrire un personnage masculin, l’analyse est la même 😉

A demain pour un petit état d’avancement de l’écriture de mon roman,

Bonne journée,

Marièke

Crédit image : Deux femmes, par Clarisse Meyer (Unsplash, CC0).

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5 comments

Gaufrette 10 mars 2017 - 10 h 46 min

J’ai beaucoup, voire presque uniquement, des héroïnes dans mes romans et nouvelles. Je pense que ce serait bon d’en parler plus en détails sur mon blog. Je vais préparer ça. En tout cas je pense comme toi, un perso féminin s’écrit comme un masculin.

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Ramimou 10 mars 2017 - 11 h 21 min

C’est bien que tu soulignes le fait qu’il faut laisser une place aux personnages féminins aussi bien dans les premiers rôles que dans les rôles secondaires, et notamment avec les 3 exemples que tu donnes. Dans un certain nombre de romans, malheureusement, les personnages secondaires féminins sont souvent réduites au rôle de caissière/vendeuse/esthéticienne.

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Valentyne 10 mars 2017 - 13 h 50 min

Article tes intéressant ..
Je ne m’étais jamais posé la question sur le sexe des quelques personnages que j’invente 🙂
Je vais aller compter …
Sinon je recommande ce livre pour ces personnages féminins : https://lajumentverte.wordpress.com/2015/08/09/chroniques-du-pays-des-meres-elisabeth-vonarburg/

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Dorian Lake 10 mars 2017 - 19 h 28 min

C’est exactement ça. Le sexe/genre ne représente qu’un aspect de la vie d’un personnage, et ne devrait pas le définir outre-mesure. Et du coup, écrire des femmes n’est pas plus inaccessible à un auteur homme que femme. Les clichés sont d’ailleurs présents dans les textes d’auteurs et d’autrices à égale mesure.

J’en parle dans cet article, que je me permets de partager, nos visions se rapprochant:

http://dorianlake.blogspot.fr/2015/10/la-personnage-et-le-genre.html

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Bertrand 30 décembre 2017 - 19 h 46 min

Excellente analyse, merci pour cette synthèse qui (une fois de plus) traite d’un sujet important et rarement développé.
Je suis globalement d’accord avec votre article et les commentaires ci-dessus, mais avec un bémol cependant.
Il faut différencier différentes formes de sexisme, par exemple :
– Dans l’assommoir, le personnage de Gervaise Macquart ne semble pas faire exception à beaucoup d’idées reçues, et pourtant
– Dans Tomb Raider, le personnage de Lara Croft est sensé réussir tous les tests et museler les plus exigeant(e)s d’entre nous
Où est l’erreur ?

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