À la découverte du projet Draftquest avec son fondateur, David Meulemans

by Marièke

La semaine dernière, je vous présentais Lynda Guillemaud. Parmi les ressources qui lui avait remis le pied à l’étrier de l’écriture, elle évoquait le MOOC Écrire une oeuvre de fiction. La saison 4 de ce dernier reprend au début du mois de janvier 2016, l’occasion pour moi de vous présenter David Meulemans, fondateur du projet Draftquest qui diffuse ce MOOC (entre autres). Merci à lui d’avoir accepté de répondre à ces quelques questions !

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Tu es à l’origine du projet Draftquest. Quel en est le but et pourquoi t’être lancé ? Qui t’accompagne sur le projet ?

Le projet DraftQuest est né de la collusion de plusieurs histoires.

En tant qu’éditeur (aux éditions Aux forges de Vulcain), je faisais l’expérience de deux phénomènes. D’une part, la difficulté de trouver des textes qui me conviennent. D’autre part, une montagne de manuscrits dans lesquels il y avait beaucoup d’erreurs récurrentes. Cela dit, le fait qu’il y ait dans ces centaines de manuscrits des erreurs récurrentes n’aurait pas dû me soucier — en tant qu’éditeur. Après tout, le but d’un éditeur n’est pas d’aider les écrivains en herbe à mieux écrire.

Mais voilà, avant d’être éditeur, j’avais longtemps enseigné et fait des recherches sur la créativité. Donc j’aime bien aider des personnes à apprendre. Et j’avais à ma disposition une dizaine d’années de données sur les pratiques artistiques sous la forme d’articles de psychologie, par exemple, sur l’angoisse de la page blanche. Ces deux aspects de ma vie, le côté éditeur et le côté enseignant et chercheur, commençaient à se contaminer l’un l’autre.

Pile à ce moment-là, le Labo de l’édition (ndlr : un incubateur d’entreprises sur les pratiques de l’édition du demain. Ils ont notamment aidé Cylapp à se développer.) s’est créé et cherchait des projets innovants autour de l’édition. J’ai proposé une première ébauche de DraftQuest et nous avons été sélectionné. Nous nous sommes lancé ainsi. Nous avons passé trois ans au Labo de l’édition. Nous volons de nos propres ailes depuis quelques mois, mais restons très attachés au Labo. Quand je dis « nous », c’est un développeur à temps partiel et moi, qui consacre une très grande partie de mon temps à ma maison d’édition. Le projet de DraftQuest est volontairement un projet « léger »: nous avons peu de frais, cela nous permet de rester gratuit.

Peux-tu décrire les éléments qui composent le projet ? Qu’ont à leur disposition les personnes qui rejoignent Draftquest ?

Avec le temps, deux besoins ont émergé chez les écrivains en herbe que je suivais. D’une part, il leur fallait un outil qui leur permette de ne plus ressentir l’angoisse de la page blanche, et de développer une pratique très régulière de l’écriture. D’autre part, une fois qu’ils avaient acquis cette habitude d’écrire au quotidien, il leur fallait un peu de conseils sur comment écrire, comment progresser.

Donc, DraftQuest, c’est à la fois une application web (ou webapp) très simple, et un atelier d’écrire virtuel, le « MOOC » DraftQuest. Un MOOC, c’est un « Massive Open Online Course », un cours en ligne, gratuit, avec un grand nombre de participants. La webapp aide à écrire, le MOOC aide à structurer.

Mais, en vérité, une des plus grandes réussites, c’est la petite communauté qui s’agrège peu à peu autour de ce projet, d’écrivains en herbe, tous bienveillants, avec une mentalité artisanale, des goûts très variés, mais une même mentalité de partage. Certains sont publiés, certains sont autopubliés, mais tous ont de vrais lecteurs et sont donc capables de partager leur expérience et d’aider des débutants à avancer. Ils sont trop nombreux pour que je les cite tous: Louise Caron, Maryse Trécourt, Azel Bury, Lynda Guillemaud, Jean Heffeder, Max Alaric, Marie Berchoud… j’en oublie, je m’en excuse.

Donc, pour répondre à ta question, en sautant dans la barque DraftQuest, on s’engage dans la belle aventure de l’écriture avec, concrètement: une webapp pour écrire au quotidien, un atelier virtuel pour glaner des conseils, et une communauté bienveillante pour progresser.

Concernant la web app (que je présente ici sur blog). Elle s’organise autour de rounds : pourquoi cette décision ?

L’usage des rounds est une manière de changer la représentation que beaucoup d’écrivains en herbe se font de l’écriture. Représentation qui peut les bloquer, les empêcher d’avancer.

En gros, quand je discute avec des écrivains bloqués, ils me disent: « j’attends d’avoir du temps pour écrire » ou « je voudrais écrire, mais n’ai pas le temps ». Le round est une manière de dire : si tu as dix minutes, tu dois écrire. Et, ensuite, si tu empiles les rounds, petit à petit, tu avances dans ton travail. Je dis souvent qu’il suffit d’écrire dix minutes par jour pour écrire un roman. Cela fait parfois sourire, mais, en fait, entre chaque round de dix minutes, l’esprit continue de travailler, de ruminer, de chercher des idées. Si j’écris chaque jour de 8h35 à 8h45, je réfléchis en fait pendant beaucoup plus de temps par jour à ce que j’écris.

Bien sûr, dans la web app, rien n’interdit de faire plusieurs rounds par jour, ou de paramétrer des rounds plus longs. Mais je ne recommande pas de passer de « je n’écris rien » à « je me fixe comme défi d’écrire trois heures par jour ». Je pense que, pour acquérir une habitude, il faut d’abord être régulier, puis monter en puissance. Le meilleur moyen de bien écrire est d’écrire beaucoup… et de se poser, peu à peu, des questions sur ce que l’on écrit.

La fonction publier, qui consiste à partager au public ses écrits, va-t-elle être développée (à l’image de Welovewords) ?

Non.

DraftQuest est un outil de production d’oeuvres, pas de publication. Je pense vraiment que souvent, les écrivains en herbe abordent mal la question de la publication — ils l’anticipent trop. Cela peut les bloquer, ou les amener à écrire des choses moins réussies que ce que leur talent laissait espérer. D’ailleurs, je continue à penser que le meilleur moyen d’avoir des lecteurs, c’est d’écrire les meilleures choses possibles, pas d’être un pro de la publication ou de la communication. Donc, nous allons continuer à nous concentrer sur aider les gens à écrire, et à écrire de mieux en mieux. S’ils veulent diffuser leur travail, ils sont complètement libre.

Notre position, par rapport aux plateformes de diffusion, c’est que nous sommes en amont d’elles. Welovewords, c’est un partenaire potentiel – tout comme Librinova est actuellement un partenaire : quand les gens ont fini d’écrire chez nous et qu’ils nous demandent comment s’autopublier, nous les envoyons à Librinova en leur disant : on a regardé les différentes plateformes d’auto-publication de livres et Librinova nous semble le meilleur partenaire – l’offre est honnête, le suivi est réel. Mais les draftquesters sont libres ! Certains sont sur Amazon Kindle Direct Publishing, d’autres cherchent des éditeurs, etc.

Quelle est ta fonction préférée de l’application ?

Les pictogrammes ! C’est marrant, parce que je fais partie d’une minorité, au sein des utilisateurs de DraftQuest. La plupart des utilisateurs préfèrent le minuteur, mais moi, ce sont les pictogrammes. Dans la web app, quand on commence un round, on reçoit des petites vignettes et l’appli vous dit : écrivez à partir de ces images. Et ces images sont des déclencheurs d’écriture. Je les trouve très utiles – je les utilise tout le temps. Ces pictogrammes sont regroupés par petites collections qu’on appelle des « decks ». Certains sont abstraits, d’autres, thématisés. Par exemple, j’ai fabriqué moi-même un « deck » inspiré de Lovecraft, histoire de m’aider à écrire des histoires fantastiques. C’est vraiment ma fonction préférée ! Je trouve que c’est à la fois la plus ludique, et celle qui me débloque le plus.

L’application est en cours d’évolution. Quelles sont les prochaines étapes ?

J’aimerais que, parallèlement à la web app, qui est utilisable dans un navigateur, on ait une vraie application, utilisable sur les smartphones. Comme je prends beaucoup les transports en commun, cela me plairait bien d’écrire davantage dans le métro. Mais, comme DraftQuest est gratuit, nous progressons très lentement dans la réalisation de cette app, faute de budget. Pour l’heure, nous ne vendons qu’une chose, des ateliers d’écriture physique qui sont une sorte de stage accéléré de 48h pour se lancer dans l’écriture d’un roman. Donc, on progresse!

Mais sinon, ce que l’on va voir rapidement apparaître, c’est un petit outil de scénarisation, qui donne comme des canevas aux écrivains en herbe. C’est un outil que je teste depuis un an dans mes ateliers d’écriture et qui fonctionne bien. C’est inspiré de divers techniques de scénaristes hollywoodiens et c’est un moyen d’encourager la scénarisation des récits. Mon petit travail, ces jours-ci, consiste à trouver un bon équilibre dans ces canevas, de manière à ce qu’ils incitent à la création et pas à l’uniformisation.

Le 4 janvier ouvre la quatrième édition du MOOC Écrire une oeuvre de fiction. Quel est son concept ? Des personnes y ayant déjà participé peuvent-elles recommencer (et trouver des éléments nouveaux) ?

L’atelier « Écrire une oeuvre de fiction » revient effectivement très bientôt !

En gros : cela dure douze semaines, avec huit semaines d’écriture puis quatre semaines de réécriture. Concrètement, c’est huit vidéos de cours qui tombent le samedi. Et une petite vidéo d’encouragement, chaque jour de la semaine. Ce sont de petits exercices d’écriture. Et surtout, beaucoup d’interactions, soit sur notre forum, soit dans le groupe Facebook du groupe.

Beaucoup de participants des précédentes éditions ont prévu de revenir. Et ce, pour diverses raisons. D’une part, les conseils que je peux dispenser dans ce MOOC restent, quelle que soit votre expérience de l’écriture, des conseils simples mais nécessaires. D’autre part, la richesse de ce MOOC, c’est plus le cadre qu’il donne à ses participants, et la conversation collective qu’il permet. Conversation dans laquelle on trouve des débutants, des écrivains publiés et à laquelle je prends une part très active.

Sinon, il y aura des nouveaux petits exercices dans notre interface – et je vais enregistrer, au fil de l’eau, de courtes vidéos pour répondre aux questions qui apparaissent en cours de MOOC ! J’ai très hâte que le MOOC commence, c’est vraiment le moment excitant et stimulant de l’année. Et, à la fin du MOOC, il y a un petit concours: un texte sera publié aux Editions Aux forges de Vulcain – et plusieurs textes vont gagner des formules d’auto-publication chez Librinova.

À part le MOOC, quelles sont les nouveautés 2016 du projet ?

C’est un peu tôt pour en parler… Je prépare un gros projet pour le printemps – une grosse expérience extrême, pour montrer tout ce que les nouveaux outils d’écriture peuvent apporter à la fiction… Mais on en reparlera à la fin du MOOC, en mars !

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Merci David ! Et bon courage pour cette saison de MOOC !

Je vous présenterai demain plus en profondeur la web app Draftquest, qui a des airs de Write or Die en version beaucoup plus soft (pas d’alarme et d’écran rouge qui s’affichent pour les retardataires !).

Pour vous inscrire au MOOC, c’est par ici ! J’y suis déjà inscrite. Je l’avais fait il y a deux (trois ?) ans et je l’avais trouvé intéressant même si je n’avais pas réussi à le suivre en entier. Pour ceux qui ont toujours voulu prendre des cours d’écriture, c’est une bonne idée. (Ne faîtes pas attention à la date du site d’inscription qui parle d’ouverture en février 2016, c’est une erreur, le MOOC commence bien en Janvier !)

A demain !

Marièke

Crédit image : Un brouillon et le logo de Draftquest, emprunté pour les besoins de l’article. (Pixabay, CC0)

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